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Franz Liszt : Concerto pour piano et orchestre n°2 en La Majeur, Légende de Saint François d’Assise préchant aux oiseaux, Légende de Saint François de Paule marchant sur les flots, Concerto pour piano et orchestre n°1 en mi b Majeur. Claire-Marie Le Guay, piano. Orchestre Philharmonique de Liège, direction : Louis Langrée. 1 CD Accord, Réf : 472 728-2. Enregistrement du 13 au 16 juillet 2002.

 
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Claire-Marie Le Guay interprète Franz LisztEncore ces deux concertos de Liszt, pourront dire les mauvaises langues. Et pourtant, nous sommes toujours dans l'attente d'une version pouvant donner une alternative à l'exceptionnelle lecture de Sviatoslav Richter dirigé par Kondrashin (Juillet 1961 : CD Philips). Nombreuse sont pourtant les réussites discographiques (Claudio Arrau et Alfred Brendel (Philips), Samson François (EMI), Lazar Berman (DG) et bien d'autres encore) mais aucun n'a su faire montre d'une telle passion, d'une telle architecture sonore, d'une si parfaite symbiose entre orchestre et piano se livrant un intense combat épique et triomphal. Aujourd'hui, il faudra aussi compter avec , qui nous offre là une très belle réussite.

Tout d'abord un ordre judicieux des pièces : le deuxième Concerto très lyrique ouvre ce disque, suivi par les méditatives Légendes, pour se terminer sur le déferlant premier Concerto. Paisible mélodie d'ouverture du La majeur avec un piano qui entre comme une harpe en de longs arpèges qui ne laissent pas imaginer ce qui attend les protagonistes : grands thèmes héroïques, présence menaçante des cuivres qui font penser à la Faust Symphonie de 1854. Le piano n'est pas seulement soliste : parfois accompagnateur de l'orchestre, parfois en parfaite harmonie avec celui-ci, nous avons là du grand Liszt. Créé le 07/01/1857 à Weimar par son élève Hans von Bronsart (Liszt à la baguette), il fallut près de vingt ans pour que le compositeur nous livre cet immense poème rhapsodique. Durant cette période (1839-1861), il livra une production orchestrale intense qui a influencé les différents remaniements du concerto : la Faust Symphonie de 1854 précitée, mais aussi la Dante Symphonie (1856) et les Poèmes symphoniques.

Fait de transformations thématiques sous forme de variation, le Concerto en La Majeur est un exemple du genre : le dernier mouvement est une vaste métamorphose du premier, la mélodie d'ouverture fort lyrique devient le thème de marche du finale, qui est à son tour transformé à la fin en un thème passionné ; comme si le compositeur troublé trouvait son équilibre dans une apothéose grandiose. Ces transformations donnent une grande cohérence à l'ensemble de l'œuvre. Mais Liszt s'est fait subtil : ainsi, le scherzo en si bémol mineur de l'Allegro moderato, qui devient plus loin une mélodie en Mi majeur. Comme pour le premier concerto, Liszt rompt avec la traditionnelle formule en trois mouvements, nous en donnant ici pas moins de six, qui s'enchaînent par d'habiles transitions laissant croire que l'on entend un seul et long processus.

mène l'orchestre de mains de maître. Pas une note au dessus de l'autre, point d'effets pompeux comme trop souvent c'est le cas dans ces partitions. Le piano sait se faire délicat, nous offre une chaleur et une rondeur magnifiques.

Les deux Légendes sont de véritables poèmes symphoniques pour piano seul. Méditatives à souhaits, elles ont été composées en 1863 entre les deuxième et troisième Années de Pèlerinage et appartiennent à la production religieuse de Liszt. sait à merveille nous faire entendre les oiseaux avec lesquels Saint François d'Assise converse. Écoutez les trilles sous les doigts de la pianiste, une volière au réveil ! La Légende de Saint François de Paule fait montre d'une plus grande ferveur au travers d'un choral à l'esprit des plus religieux. Esprit serein empreint de la foi du Saint, contrasté par la fureur des flots qu'il traverse sur son manteau qu'évoquent les traits de virtuosité. La légende se termine sur une dernière évocation du choral qui résonne puissamment ; indiquant ainsi l'arrivée de Saint François de Paule au terme de sa traversée.

Le dédicataire du Mi bémol, Henry Litolff, qualifiait les deux concertos de Liszt de « Concertos symphoniques » et il est vrai que l'expression s'adapte à merveille, surtout pour le premier. Créé le 17/02/1855 à Weimar par Liszt sous la direction de Berlioz, cette composition est d'une veine des plus romantiques. L'entrée est fracassante ; mais c'est pour offrir un contraste plus prononcé avec la douceur et la délicatesse qui suivent. Les thèmes poignants du Quasi Adagio seront récurrents tout au long de l'œuvre, transformés et sublimés. Trop souvent proche de la fanfaronnade, l'interprétation d'une telle page est périlleuse, car son écriture ne laisse pas place à la médiocrité ; la juste mesure de l'équilibre sonore des parties est redoutable à obtenir pour ne pas rendre le déroulement pompeux. Liszt a destiné avant tout cette œuvre à une représentation publique impliquant, selon ses propres termes, « une expression brillante et un style grandiose ». Mais grandiose ne doit surtout pas se transformer en grandiloquent. Claire-Marie Le Guay et se tirent avec une facilité déconcertante de tous les pièges : ils se font caressants dans les passages les plus élégiaques, puissants et envahissant tout l'espace lorsque nécessaire — sans tomber dans les effets faciles.

Ce concerto offre quelques particularités qui en font toute son originalité. De nombreux segments mettent en évidence des parties solistes d'autres instruments dialoguant avec le piano : comme s'il s'agissait tout simplement de musique de chambre. Liszt a été jusqu'à offrir au triangle une place privilégiée, puisque celui-ci ouvre en soliste et partenaire unique du piano le scherzo de l'Allegro vivace ! Ce qui ne fut pas accueilli sans raillerie par les critiques les plus conservateurs de l'époque, allant jusqu'à parler de « Concerto pour triangle ».

Même si nous ne nous lassons pas de l'écoute de ce disque, ajoutons tout de même un bémol — mais si léger — à l'écoute des traits pianistiques en forme de gammes descendantes et montantes dont Liszt parsème ces deux ouvrages. Nous n'avons pas retrouvé l'extrême fluidité de Richter, qui donne le sentiment que chaque note est la juste prolongation de la précédente. Mais peut-être ne sommes-nous pas objectifs, car il faut reconnaître que Claire-Marie Le Guay signe là, pour son premier disque de musique concertante, un enregistrement à ne surtout pas écarter.

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