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Aldo Ciccolini à Pleyel, Saint-Saëns comme jamais

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Paris. Salle Pleyel. 29-IX-2006. Maurice Ravel (1875-1937) : Une barque sur l’océan ; Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Concerto pour piano et orchestre en fa majeur n°5 opus 103 « L’Égyptien » ; Claude Debussy (1862-1918) : Printemps ; Ibéria. Aldo Ciccolini, piano. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Mikko Franck.

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Pour pouvoir affirmer une consistance propre à la musique française (de Couperin à Boulez ?), il faut jeter le trouble dans l'âme de ceux qui s'autoriseraient encore une préférence entre Ravel et Debussy, pour les arracher à des empathies trop hiérarchisées ou du chauvinisme trop dispersé !? Telle serait la raison pour laquelle ce concert s'ouvrait sur l'œuvre la plus debussyste du répertoire de Ravel, du moins la plus impressionniste (au sens, pour le coup, le plus » touffu » du terme « impressionnisme »). Il est vrai qu'Une barque sur l'océan ne se distinguait pas toujours très bien, les différents pupitres de l'orchestre faisant moins attention à la distinction des timbres qu'à la beauté des volumes qui, pour le coup, ne se laissaient intimider par un climat assez bucolique (même si l'onctuosité des nuances les plus grosses viraient parfois au poignant, presque psychologique).

Contre toute hésitation stylistique, dans le Concerto pour piano n°5 de Saint-Saëns, donnait parfait, répondant à chacune des articulations de l'orchestre. La souplesse des développements et la juste hardiesse des courbes confinant à la grâce, pour autant que l'acoustique n'est pas, en tout point de la salle, avantageuse pour l'équilibre entre le piano et l'orchestre. Le mouvement central, à l'emportement plus folklorisant, sert d'exercice de style, sinon de jeu décisif dans l'articulation entre virtuosité faussement poseuse et folklorisme pimpant, dont Ciccolini sert la fantaisie avec une radicalité terriblement sienne. Si bien que : un passage admirablement subtil dans le toucher, une sur-précision de l'épaisseur, et quel timbrage à la main gauche ! Dans le troisième mouvement, des passages se donneraient pour sautillants, mais dégagent une telle énergie, tellement de souffle dans l'étincellement, que le dramatisme en est comme battu en brèche. En bis, pour le public de Pleyel, plus que chaleureux, interprète la première Gymnopédie de Satie comme il ose rarement à ce point l'assumer élastique et, presque, déstructurée. Suit une standing ovation et, puisque le public était debout, l'entracte.

La seconde partie était composée de deux œuvres de Debussy : dans le Printemps, le Philharmonique de Radio France offrait des vents aux caractères bien trempés, ce qui donnait parfois un aspect agaçant au velouté général, une nonchalance un peu moins fringante qu'il ne faudrait pour que la fantaisie se fasse un peu cinglante. Dans Ibéria, les phrases très bien déliées, la précision quasi-métronomique (pratiquement obsessionnelles pour les castagnettes et le tambour) et la limpidité presque surfaite du contrepoint, donnaient au premier mouvement une ambiance quasiment scolaire, assez hors de propos (« Par les rues et par les chemins » offrant, dans les tutti, une homogénéité plus évidente, sinon qu'immanquable). Dans Les parfums de la nuit, les couleurs harmoniques se suivent, ont l'air d'aimer ne pas trop se ressembler, et l'orchestre se prend bien au jeu, soignant de ne pas en faire trop avec le caractère mystérieux. Finalement, le Matin d'un jour de fête se montre bien plaisant, justement mesuré pour cela, les rythmes syncopés sont servis avec l'efficacité pendante, certes, mais on ne peut pas cracher sur quelques paillettes quand arrive la fin du concert, un vendredi soir…

Crédit photographique : © Heikki Tuuli

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Paris. Salle Pleyel. 29-IX-2006. Maurice Ravel (1875-1937) : Une barque sur l’océan ; Camille Saint-Saëns (1835-1921) : Concerto pour piano et orchestre en fa majeur n°5 opus 103 « L’Égyptien » ; Claude Debussy (1862-1918) : Printemps ; Ibéria. Aldo Ciccolini, piano. Orchestre Philharmonique de Radio France, direction : Mikko Franck.

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