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Turandot version Renaud Doucet : un conte de fées

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Vienne. Volksoper. 5-XI-2006. Giacomo Puccini (1858-1924) : Turandot, opéra en trois actes sur un livret de Giuseppe Adami et Renato Simoni. Mise en scène : Renaud Doucet. Décors et costumes : André Barbe. Avec : Eva Urbanova, Turandot ; Roy Cornelius Smith, Calaf ; Leticia Brewer, Liu ; Albert Pesendorfer, Timur ; Peter Minich, Altoum ; Daniel Schmutzhard, Ping ; Christian Drescher, Pang ; Thomas Sigwald, Pong ; Einar Th. Gudmundsson, un mandarin. Chœur du Volksoper (chef de chœur : Michael Tomaschek), Orchestre du Volksoper, direction : Leopold Hager.

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Le Volksoper propose depuis le 27 octobre une nouvelle production de Turandot. Disons d'emblée que sur le plan scénique cette production est une réussite.

Nous avons vu ces dernières années tant de mises en scène transgressives, gratuitement scandaleuses, minimalistes, ou qui obligent à lire dix pages du programme pour comprendre le propos caché du metteur en scène, que cette Turandot est un plaisir à déguster sans arrière-pensées. Au lever de rideau, la scène est plongée dans l'obscurité et le silence ; des silhouettes exécutent quelques mouvements sautillants avant que l'orchestre ne commence à jouer. La scène enfin éclairée nous plonge dans un monde féerique, à mi-chemin entre le dessin animé d'anticipation et Jérôme Bosch. La variété des costumes, la palette des couleurs, le soin apporté aux éclairages, les mouvements des choristes, des danseurs, tout concourt à nous dépayser. L'atmosphère recrée parfaitement ce que l'œuvre était à l'origine : un conte de fées. La mise en scène et la scénographie du tandem Doucet-Barbe permet une parfaite lisibilité de l'intrigue tout en la nimbant de poésie.

Quelques effets spectaculaires sont les bienvenus : l'apparition de Turandot, bien sûr, ou de son père, juchés en haut d'un cône qui s'élève au-dessus de la scène ; les effets phosphorescents de certains costumes quand la scène est plongée dans l'obscurité, ou encore la présence de certains êtres hybrides mi-hommes mi-insectes. Plusieurs idées sont habilement exploitées : par exemple pendant la scène des énigmes, Turandot se trouve sur une plate forme circulaire élevée qui descend à chaque fois que Calaf trouve une bonne réponse, rapprochant peu à peu Turandot des simples mortels. Quand Calaf a donné toutes les réponses, Turandot, déchue au sens propre comme au figuré, peut enfin fouler la scène et se mêler aux autres personnages.

L'orchestre du Volksoper trouve en une direction sûre et efficace. On regrette que la salle du Volksoper, bien moins vaste que celle du Staatsoper, ne permette pas au forte ou fortissimo de sonner avec la rondeur souhaitée. Une certaine saturation acoustique agresse parfois les oreilles. Les chœurs renforcés se tirent correctement de leur partie et ne se contentent pas d'entrer et de sortir : ils chantent et ils jouent.

L'équipe de solistes est plus irrégulière. Tout d'abord signalons la volonté de distribuer le vieil Altoum à un vétéran d'un âge respectable (Peter Minich), ancienne vedette du Volksoper. La voix ne sonne pas jeune, loin s'en faut, mais on l'entend. Rien à redire de Ping, Pang et Pong, irréprochables. Timur et Liu sont un peu plus effacés, la dernière surtout. Le format vocal de Leticia Brewer est un peu limité. Quant aux pleurs bruyants ajoutés à peine lâchée la dernière note de «Signore, ascolta», c'est un peu brutal et rompt la magie de cet air et de l'aigu filé. Le ténor Roy Cornelius Smith est une heureuse surprise : son Calaf est vibrant, la voix, bien projetée, se déploie sans problème et sans faute de goût. La Turandot de Eva Urbanova rejoint la cohorte des Turandot chantées par des sopranos dans une deuxième phase de leur carrière, c'est à dire dont la voix a perdu quelque peu de son émail. Les aigus sont parfois criés, le souffle est plus court qu'autrefois, le timbre un peu sec ; malgré ces réserves, sa Turandot n'est pas indigne, juste un peu fatiguée.

Au final, on sort de cette Turandot enchanté, au sens littéral : le charme a opéré.

Crédit photographique : © Volksoper, Vienne

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Vienne. Volksoper. 5-XI-2006. Giacomo Puccini (1858-1924) : Turandot, opéra en trois actes sur un livret de Giuseppe Adami et Renato Simoni. Mise en scène : Renaud Doucet. Décors et costumes : André Barbe. Avec : Eva Urbanova, Turandot ; Roy Cornelius Smith, Calaf ; Leticia Brewer, Liu ; Albert Pesendorfer, Timur ; Peter Minich, Altoum ; Daniel Schmutzhard, Ping ; Christian Drescher, Pang ; Thomas Sigwald, Pong ; Einar Th. Gudmundsson, un mandarin. Chœur du Volksoper (chef de chœur : Michael Tomaschek), Orchestre du Volksoper, direction : Leopold Hager.

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