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Le Bolchoï de Moscou, tradition et avenir

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C’est l’un des théâtres les plus prestigieux et mythiques du monde. Après plusieurs années d’une restauration longue et très couteuse, le Grand Théâtre (Bolchoï) brille à nouveau et cherche à se placer sur la scène internationale. ResMusica vous emmène à travers l’histoire de cette scène de légende.

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En 1776, l'impératrice Catherine II de Russie accorde au prince Piotr Ouroussov l'autorisation d'ouvrir une compagnie de théâtre privé à Moscou. Cette compagnie itinérante se produit dans plusieurs lieux de la ville. L'entreprise, déjà très couteuse, est financée par Michael Maddox, un entrepreneur de spectacle russophile.

En 1780, le duo achète le théâtre Petrovsky, sur la rive droite de la rivière Neglinka. Les spectacles, selon le goût de l'époque, présentent des opéras comiques avec des interludes dansés. Même si le succès public est au rendez-vous, les finances ne cessent de se creuser ! La gestion du théâtre est progressivement transférée dans le giron de l'Etat La disgrâce de Maddox est progressive et sa ruine bientôt complète !

En 1796, le gouvernement devient propriétaire du théâtre. En 1802-1803, il est confié au prince Volkonsky, dont la compagnie privée était l'une des plus appréciés de Moscou. Ce dernier modernise la gestion et crée des passerelles entre sa structure et la formation des futurs artistes. Mais en 1805, un incendie ravage le théâtre. Ce n'est que le début d'une série de soucis, car en 1812, pendant l'épisode napoléonien et l'incendie de Moscou, l'édifice destiné à remplacer le théâtre Petrovsky est également la proie des flammes.

En 1818, un concours est lancé afin d'établir un nouveau théâtre. Il est remporté par Andrei Mikhailov, professeur à l'Académie des Arts. Cependant, son projet est trop cher et le gouverneur de Moscou désigne l'architecte Joseph Bové pour modifier les plans et tirer les coûts vers le bas. Les travaux commencent en 1820. Le bâtiment fait grande impression avec sa façade massive décorée par un portique à colonnes surmontées d'un fronton où se dresse un grand groupe sculptural.

Le 6 janvier 1825, l'inauguration officielle vient consacrer la magie et la beauté d'un théâtre qui est alors le plus vaste de Russie. Au fil des ans et des envies du public, le répertoire, au départ essentiellement dramatique et chorégraphique fait une place, de plus en plus grande, à l'opéra. On retrouve les œuvres de Donizetti, Rossini, Meyerbeer et Glinka avec ses opéras La Vie pour le Tsar (1842) et Rousslan et Ludmilla (1846).

Le sort s'acharne sur le théâtre. Le 11 mars 1853, il est, à nouveau, dévasté par les flammes. Au terme de trois jours d'incendie, il ne reste que les pans de murs calcinés. Albert Kavos, architecte en chef des théâtres impériaux, est désigné à la tête d'une équipe en charge de la reconstruction. Les travaux doivent être menés avec efficacité car le théâtre doit être rouvert pour les festivités liées au sacre du Tsar Alexandre II. Kavos a apporté de sérieuses modifications à l'édifice, il est agrandit au point de pouvoir accueillir 2300 personnes. Mais, le nouveau Bolchoï séduit surtout par son acoustique, alors célébrée comme l'une des meilleures du monde.

Les premières mondiales se succèdent : Boris Godounov de Moussorgski (1888) ou de la Fille de Pskov de Rimski-Korsakov avec Chaliapine en Ivan-le-Terrible.

Le 28 février 1917, les murs résonnent du dernier spectacle de l'époque impériale. La Révolution d'Octobre amène également des changements dans l'aspect de la grande salle. Le rideau de scène, frappé des emblèmes impériaux, est remisé pour céder la place à un autre rideau de scène où apparaissent les dates révolutionnaires, puis les symboles de l'URSS.

Au début de l'ère rouge, le Bolchoï  est reconvertit en salle de congrès. Entre les spectacles, les assemblées générales des Soviets s'y réunissent. L'URSS est proclamée dans la grande salle. Mais la musique reste présente avec, en 1936, la création de Lady Macbeth de Mzensk de Chostakovitch. Un spectateur assidu, Staline, détestera cet opéra ! Fidèle du théâtre, le Vojd assistait aux représentations depuis une loge située près de la scène, au-dessus de la fosse d'orchestre et d'où il était visible des seuls chanteurs !

L'invasion nazie, en 1941, et la bataille de Moscou, conduisent à une fermeture temporaire du bâtiment. Le Bolchoï est même bombardé, mais il parvient à rouvrir, en 1943, avec une représentation d'une Vie pour le Tsar de Glinka dont la portée tsariste est évacuée au bénéfice d'une portée patriotique.

Après la seconde guerre mondiale, des travaux d'entretien sont accomplis, mais sans régler les problèmes de la stabilité du bâtiment, ni celui du manque d'espace pour le travail quotidien des artistes. L'anecdote où devait faire la file devant l'unique toilette de son étage, fit le tour du monde.

En 1987, un décret du gouvernement ordonne la mise en place d'un plan de travaux urgents ! Pourtant, il faut attendre 2005 pour observer la fermeture du théâtre et le lancement de ces travaux. Le programme est colossal car, selon les estimations, entre 50 % et 70 % de l'édifice est dans un état précaire. Après près de quatre ans d'études approfondies de la structure, les travaux peuvent commencer, en 2009. Le chantier est délicat car il faut combiner la stabilisation du bâtiment, avec le respect de son authenticité sans oublier la nécessaire modernisation de certains espaces et sa mise en conformité avec les règles de sécurité. Environ 3500 spécialistes s'activent pour redonner vie au théâtre. La décoration du foyer  est désormais identique à celle de 1895, date à laquelle le théâtre avait été rédécoré pour le couronnement de Nicolas II. Cœur de toutes les attentions, la grande salle recouvre son prestige et son acoustique légendaire du XIXe siècle. Les parquets et les mosaïques vénitiennes des espaces publics retrouvent vie tandis qu'il faut des kilos d'or pour redorer toutes les parties. Des salles de travail et de répétitions, ainsi qu'une salle modulable (qui hérite du nom de salle Beethoven) complètent le théâtre sans oublier de multiples douches et sanitaires pour les artistes.

En dépit d'un budget colossal et de différentes affaires de pots de vin révélées par la presse, le nouveau Bolchoï rouvre ses portes à l'automne 2011.

Théâtre de répertoire et de tradition, le Bolchoï se cherche une voie entre respect du passé et innovation. Le plus délicat sera de convaincre un public, gardien du temple et des conventions, qu'il faut évoluer et se rapprocher des standards internationaux en termes de mise en scène et de chorégraphie. Ainsi, une nouvelle production de Rousslan et Ludmilla de Glinka, confiée au trublion Dimitri Tcherniakov, a reçu un accueil des plus timides. Turandot, mise en scène par la très active Francesca Zambello, en janvier 2012, donne à voir une mise en scène contemporaine politiquement très correcte et peu dérangeante dans son aspect volontairement spectaculaire. Le réservoir de voix russes est toujours épatant même s'il offre son lot de découvertes et de déceptions. Certains échos parlent même de l'arrivée de Gérard Mortier au poste de directeur artistique afin de décaper les scories du passé… Le provocateur en chef du monde lyrique au pays des ex-Soviets risque de devoir surmonter un défi colossal…

Crédit photographiques : DR/Damir Yusupov.

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