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Court-Circuit sous la direction d’Evan Christ

L' bouclait sa saison par un concert en partenariat avec l'Orchestre Philarmonique du Staatstheaters Cottbus, une phalange germanique implantée dans l'État du Brandenburg qui se singularise par son engagement dans le répertoire d'aujourd'hui. Philippe Hurel avait confié la direction du concert au chef titulaire de l'orchestre , un états-unien de Los Angeles très étonnant dont le geste, électrisant autant qu'efficace, parvenait à galvaniser les énergies et donner à la soirée une intensité sidérante.

Débuter avec la Danse aveugle de était en soi un défi tant cette pièce virtuose et éminemment gestuelle exige de contrôle et d'équilibre sonore de la part des exécutants. en fait jaillir l'énergie et les tensions intérieures en détaillant les mille facettes colorées de cet objet fractal qui révèle progressivement son unité et sa cohérence.

Il dirigeait ensuite L'Harmonie des sphères, l'une des plus belles partitions pour petit ensemble d', un compositeur dont on entend trop peu souvent la musique en France. Passionné d'astrophysique qui nourrit ici son inspiration, Gaussin entend traduire en musique et en mouvement, la cinétique des corps célestes tournant sur eux-mêmes : « mon désir était de donner, par le seul biais de l'écriture, l'illusion d'un espace à trois dimensions » déclare-t-il. Par un dosage très fin des sonorités et un remarquable travail sur les timbres et les textures qui se transforment à mesure, Gaussin modèle son matériau et en éprouve les ressorts expressifs au fil d'une trajectoire très étonnante qui captive l'écoute. et ses musiciens, tous remarquables, en entretiennent magnifiquement la tension jusqu'au déchirement – le « trou noir » évoqué par le compositeur – spectaculaire et définitif.

Si le discours musclé et un rien bruyant de Finnagain speaking, une pièce pour neuf instruments de l'Allemand peine à trouver une cohérence, Charleston de retient toute notre attention. Professeur de composition à l'Université californienne de Berkeley depuis quatre ans, avait fait le voyage pour venir écouter Charleston, une pièce pour 15 instruments de 2005-2007 qui prouve, s'il est besoin, que le matériau saturé offre au compositeur une palette de couleurs, de registres et de dynamiques d'une étonnante efficacité formelle et expressive. La violence de la déflagration initiale signale d'emblée l'intensité soutenue et l'énergie vitale qui vont gorger l'écriture de toute la pièce. Bedrossian s'empare de quelques « timbres » reconnaissables – solo de trombone, de batterie… très jazz – pour les soumettre à son geste puissant et subversif, sous l'action d'un processus qui va activer la convergence de tous ces matériaux dans un maelström de sonorités en fusion. Merveilleusement réactifs au geste d'Evan Christ, les musiciens proposaient ce soir une version flamboyante mais sans outrance de la partition, laissant apparaître en filigrane toute l'ingénierie de l'écriture et l'éminente fulgurance du trait.

Crédit photographique : © Elie Kongs

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