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Triomphale Penthesilea de Dusapin à La Monnaie

aime l'opéra et l'opéra le lui rend bien. Penthesilea, son septième opus lyrique, créé à La Monnaie de Bruxelles, est une immense réussite musicale.

, a jeté, pour sa nouvelle oeuvre, son dévolu sur Penthesilea du dramaturge allemand , remix d'une folie romantique de la reine des Amazones qui tire vers la transe infernale et mortifère. Le compositeur retrouve également après Médée (Medeamaterial), créé sur cette même scène de La Monnaie (1992), un sujet issu des mythes et légendes de l'Antiquité. En une heure et quarante-cinq minutes, Penthesilea n'est que rage et folie destructrice, pas si éloignée de l'Elektra de Richard Strauss par sa force brute musicale et dramatique. Redoutable pour les chanteurs, l'écriture de , que l'on n'a pas connue aussi inspirée et visionnaire depuis longtemps, est un chef d'œuvre de science vocale et orchestrale. Les teintes sont sombres et les tons sont noirs, mais le drame est traversé parfois d'une illumination interrogative comme les notes de l'inattendu cymbalum qui ponctue des moments de la partition. Rompu à l'exercice de l'opéra, le musicien sait imposer une trame narrative (en un prologue et onze scènes) faite de tensions et de paroxysmes.

A la tête des forces de La Monnaie, , venu sauver un spectacle qui devait initialement être dirigé par Ludovic Morlot, directeur musical démissionnaire de l'orchestre bruxellois. Sa rigueur et sa connaissance des musiques contemporaines les plus redoutables en font l'artisan du succès de cette production par son geste précis et sa capacité à galvaniser des musiciens qui se plaisent à applaudir chaleureusement le chef lors des saluts.

Les chanteurs sont tous viscéralement engagés dans la partition et ils ne méritent que des éloges : en Penthesilea, en Prothoe, le fidèle , éternellement dévoué à Pascal Dusapin, en Achilles et le Belge en Odysseus.

Le metteur en scène a repris le flambeau de Katie Mitchell, initialement prévue lors de l'annonce de la saison mais qui a jeté l'éponge. En homme de théâtre très expérimenté, il compose une mise en scène qui colle à l'ouvrage et qui joue le registre de l'animalité et de la violence, mais sans jamais verser dans le trash ou le vulgairement démonstratif… la musique se suffisant à elle-même par sa violence intrinsèque. La plasticienne belge  décline son vocabulaire esthétique tiré de ses matières et formes habituelles avec une omniprésence des peaux de cheval. La vidéo de Mirjam Devriendt ponctue les transitions entre les scènes. On est en présence d'un luxe de la violence pudiquement évocateur face aux tensions musicales.

Immense réussite musicale, cette Penthesilea s'imposera sans doute au répertoire lyrique et ce spectacle, de très haut vol et cohérent de bout en bout, est un temps fort de la saison bruxelloise.

Crédits photographiques :  © Foster-Théâtre Royal de La Monnaie

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