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Berlioz par François-Xavier Roth

Le « petit-frère du Requiem » (dixit Berlioz), n'a pas pas bonne réputation. L'injustice musicale vient d'être levée avec panache par à la Philharmonie de Paris.

950, c'est le nombre cité par pour la création le 30 avril 1855 à l'Eglise Saint-Eustache, de son Te Deum, imaginé dès 1848 en vue d'un éventuel couronnement de type napoléonien. Sa Symphonie des Mille à lui (les envolées vocales de la fin du numéro 1 se retrouveront de façon troublante en acmé de certain Veni creator mahlérien). Le Te Deum est un blockbuster musical mais pas que. Son gigantisme a longtemps fait écran à la haute teneur musicale d'une œuvre où le colossal dialogue avec les lignes les plus ineffables. L'un comme l'autre bénéficient de la beauté inspirée des longues mélodies dont Berlioz était coutumier. L'auditeur est à la fois écrasé par « le prodigieux, l'excessif, l'immensité matérielle » (ainsi que l'exprime Heine) et plongé dans l'humilité tranquille d'une chapelle de campagne. Inexplicablement réputé difficile d'accès, le Te Deum est au contraire une œuvre populaire au pouvoir d'embarquement immédiat.

Preuve est faite ce 20 juin 2015 (Fête de la Musique avant le plein air du Théâtre Antique de Vienne le 22 août prochain) par François Xavier Roth qui plonge amateurs et professionnels dans une interprétation qui va sonner comme le plus reconnu des enregistrements. Seulement un demi-millier d'exécutants : un mur de 400 choristes ( 250 enfants supervisés par , les autres par Michael Tranchant), 130 instrumentistes ( 9 contrebasses ! 7 harpes !!) où Les Siècles jouent les infiltrés dans le tout Jeune Orchestre fondé par Roth pour le Festival Berlioz. Et puis l'orgue, capital dans une œuvre où il dialogue avec l'orchestre du début à la fin, joué en majesté par le père du chef, , sur un simple positif amplifié (les tuyaux visibles mais muets de l'orgue de la Philharmonie ne devant être prêts à vrombir qu'en septembre prochain).

A la Philharmonie, l'on est vraiment saisi, passée la géniale introduction, par la soudaine proximité des voix. On se croirait devant les enceintes d'une chaîne hi-fi. Impression dont on ne se départira jamais. La moindre consonne est audible. C'est proprement étonnant. Le Te Deum de Berlioz test acoustique idéal pour la Philharmonie! Parfait architecte berliozien, précis, nerveux, François-Xavier Roth dirige des forces jamais prises en défaut. est l'exact contrepoint de ces ténors démonstratifs qui seraient bien en peine d'oser ce timbre de premier communiant rêvé pour le Te ergo quaesumus. Roth réintroduit la Marche pour la présentation des drapeaux hélas souvent biffée des enregistrements mais snobe le Prélude. La beauté de l'oeuvre est là devant nous, née de la passion d'un chef qui envoie en conclusion un vibrant: « Vive Berlioz ! Vive la Philharmonie ! »

Une pensée s'impose: est probablement notre Colin Davis.

Crédit photo: © Marco Borggreve

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