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Mikko Franck dirige Korngold et Mahler à la Philharmonie de Paris

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Philharmonie de Paris. 25-IX-2015. Erich Wolfgang Korngold (1897-1957): Concerto pour violon et orchestre; Gustav Mahler (1860-1911): Le chant de la terre pour mezzo-soprano, ténor et orchestre. Vilde Frang, violon; Alisa Kolosova, mezzo-soprano; Christian Elsner, ténor. Orchestre Philharmonique de Radio France. Direction Mikko Franck.

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Vilde FrangL'Orchestre Philharmonique de Radio France et son nouveau chef sont invités à la Philharmonie de Paris pour le second concert de leur saison. À côté du sublime Chant de la terre de , le concerto pour violon d' révèle au public parisien l'éblouissante violoniste norvégienne .

D'origine autrichienne, Korngold est à Hollywood, naturalisé américain, lorsqu'il écrit son concerto pour violon (1946). Il y fait principalement de la musique de film qui imprègne les thèmes du concerto. L'œuvre éminemment séduisante, en trois mouvements, engage tout à la fois la virtuosité du soliste et une irrésistible veine lyrique qui gagne l'écriture du violon comme celle de l'orchestre. Le jeu sensible autant que chaleureux de la jeune violoniste au profil botticellien n'est pas long à nous envoûter, trouvant d'emblée une complicité avec l'orchestre pour magnifier la beauté du premier thème. Le registre lumineux du violon est somptueusement mis en valeur par . La première cadence du concerto confirme le talent d'exception de l'interprète formée à la Hochschule de Hambourg.

Le second mouvement est entièrement dévolu à l'expressivité de la ligne soliste. Le geste libre et ample de la violoniste s'inscrit sur un fond orchestral très transparent qui n'est pas sans évoquer l'atmosphère mystérieuse de l'opéra La Ville morte (Die tote Stadt) – du même Korngold – que dirigera en version de concert, avec le « Philharmonique », en janvier prochain. Exogène, le troisième mouvement plus académique, est un rondo fougueux empruntant son thème refrain au répertoire des musiques de film de Korngold. C'est le lieu d'apprécier l'abattage technique sidérant de la jeune soliste et la générosité d'une sonorité magnifiquement projetée dans l'espace de la Philharmonie.

La mezzo-soprano russe et le ténor allemand sont sur le devant de la scène en seconde partie pour Das Lied von der Erde (Le Chant de la terre), symphonie de Lieder que écrit entre la Symphonie n°8, entièrement chorale, et la n°9 tant redoutée. Sensible à l'attrait pour l'Extrême-Orient qui sollicite les esprits en ce début de XXe siècle, Mahler choisit sept poèmes issus du recueil de La Flûte chinoise, traduits en allemand par Hans Bethge. « Sombre est la vie, sombre est la mort » chante le ténor dans le premier Lied, Chanson à boire de la douleur de la terre, qui influe sans doute sur le choix du titre de l'œuvre. Les quatre poèmes suivants célèbrent la jeunesse, la beauté et l'ivresse du printemps, avant le tragique sixième Lied, der Abschied (l'adieu). Aussi long que les cinq premiers réunis, ce dernier mouvement, admirable, creuse le thème de l'adieu (adieu au monde d'un homme qui se sait condamné ?) que Mahler reprendra dans sa Symphonie n°9.

Dans un contexte où le chant est souvent concurrencé par l'orchestre, la partie vocale est des plus exigeantes, réclamant une technique imparable, une diction claire et une puissance dans la projection. Autant de qualités réunies par le ténor allemand dont l'envergure et la beauté du timbre confèrent une intensité rare aux trois Lieder écrits pour sa voix (1, 3, 5). La mezzo-soprano russe , longue voix magnifiquement homogène, ne démérite pas dans ses deux premiers Lieder (2 et 4), portant le dernier mouvement vers des sommets d'expression. , magnétique, règle parfaitement les équilibres, obtenant de son geste économe autant que réactif, une plénitude de couleurs étonnante. L'adieu est une des plus belles pages mahlériennes, happant l'écoute dès les premières notes du hautbois conducteur – immense . Texte, voix et timbres instrumentaux convergent en une même trame narrative dans cette méditation sur le destin et la douleur de prendre à jamais congé d'un être aimé.

Crédit photographique : © Sussie Ahlburg

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Philharmonie de Paris. 25-IX-2015. Erich Wolfgang Korngold (1897-1957): Concerto pour violon et orchestre; Gustav Mahler (1860-1911): Le chant de la terre pour mezzo-soprano, ténor et orchestre. Vilde Frang, violon; Alisa Kolosova, mezzo-soprano; Christian Elsner, ténor. Orchestre Philharmonique de Radio France. Direction Mikko Franck.

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