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Le classique c’est pour les vieux

Sous ce nom générique quelque peu provocateur du festival « Le classique c'est pour les vieux ! », transparaît le désir, de la part d'interprètes de toute une jeune génération, de démocratiser et désacraliser la musique classique.

Pour la quatrième édition, afin d'atteindre ce but, ils ont continué à casser des préjugés qui persistent dans l'esprit de nombreuses personnes. D'abord, « le prix élevé du concert ». Il n'en est rien, tous les concerts du festival sont gratuits ! Ensuite, « le lieu de concert guindé et trop cérémonial ». Ils ont choisi deux lieux, loin d'être associés à la musique classique : L'Archipel, un couvent du 19e siècle devenu un centre d'hébergement d'urgence pour familles, dont le but est de favoriser la mixité sociale, et 59 Rivoli, ancien squat artistique transformé en espace d'exposition et atelier géant. Les formules sont également inventives. Sur 5 jours, du 7 au 11 octobre, la soirée d'ouverture est suivie d'un « afterwork musical » le jeudi du 18h à 22h ; « Une soirée inoubliable d'opéra » avec un récital en « incrustation live » (entendez : les musiciens évoluant sur fond vert, filmés en direct, dont les images sont incrustées sur des décors séparés, comme dans lq météo) et La Chatte métamorphosée en femme d'Offenbach ; enfin, un week-end non-stop de 14h à 23h avec un brunch musical à 12h le dimanche.

Les œuvres jouées vont du baroque aux contemporains – faut-il dire plutôt des « œuvres de compositeurs vivants » ? – exécutées par des musiciens parmi les plus talentueux de la génération, essentiellement, de moins de 30 ans. Chaque concert ne dure qu'une heure et quand un concert déborde son créneau horaire, on décale le début du suivant, pour que le public puisse profiter entièrement de la prestation de chaque musicien. Cool, non ? Vous dites toujours que la musique classique, c'est pour les vieux ? Alors là, vous commettez peut-être une grave erreur !

Nous nous sommes rendue à l'ex-squat vers 17h, le dimanche. Dans une pièce où on voit des tuyaux et des cordons électriques suspendus qu plafond et entouré d'objets d'art originaux, le hautboïste , qui vient de quitter l'Orchestre du Capitole de Toulouse pour le London Symphony Orchestra, donne un récital éclectique (Telemann / Berio / W.F. Bach / Holliger), notamment en faisant participer le public par des sifflets dans Sequenza de Berio. On prend un plaisir et un goût d'expérimenter la musique de notre temps. Puis, dans la galerie visible de la rue par une large baie vitrée, la cantatrice montre à quel point la musique vocale « atonale » est drôle et rigolote, mais aussi dramatique, à travers les courts Fragments d'Attila Jozsef de Kurtág et des extraits de Mysteries of the Macabre de Ligeti, avec une merveilleuse complicité d'. De nombreux passants, attirés par la performance des deux musiciens, se massent devant la vitre. A 19h, les trois Sonates pour violoncelle et piano par Noé Natorp et , formule plus « classique » peut-être, mais sur un piano droit qui sonne un peu comme un « piano du salon de chez mes parents » (mais on ne va pas jusqu'à dire « de chez mes grands-parents », car le piano est moderne !).

La soirée continue : à 20h, l'ensemble baroque livre un programme « la famille Bach » ; et le der des ders, c'est à 22h par le et l'altiste pour une formidable Schumann et Brahms, à la fois énergique et lyrique.

À travers ce festival un peu fou, on a confirmé que la musique classique, c'est pour tout le monde.

Crédit photographique : et © Leila Muse

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