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A Dijon, voyage dans la musique des Balkans

Une invitation au voyage musical, à la découverte de musiques inhabituelles… : cinq concerts de musique de chambre ont permis un beau contact avec des compositeurs venus des Balkans et pour beaucoup inconnus. De quoi compenser un manque de curiosité trop général et bien regrettable pour ce qui ne relève pas de la production artistique de l'Europe de l'Ouest.

Ce voyage, qui emprunte une route inverse de ceux qui fuient les guerres et les exactions de toutes sortes, a le mérite d'être non seulement un parcours dans l'espace mais aussi dans le temps ; on a pu entendre par exemple L'Octuor pour cordes Porin du Croate Vatroslav Lisinski qui date de 1851, une Danse rustique du Roumain Constantin Dimitrescu mort en 1928, une Sonate pour violoncelle seul du Hongrois mort en 2006, et surtout beaucoup d'œuvres de compositeurs actuels comme les Turcs , né en 1970, mort en 1991, mort en 1972, l'Albanais Çesk Zadeja, mort en 1997, ou encore le jeune Slovène né en 1979.

Durant ce voyage, on s'aperçoit que tous ces compositeurs ont à cœur de montrer leur attachement à leurs traditions nationales en utilisant les ressources qu'offre le folklore, mais en même temps qu'ils font partie de la culture européenne : en effet, ils sont les témoins de l'évolution du langage et pratiquent aussi bien les techniques romantiques (tel est le cas de l'Octuor de Lisinski) que celles suggérées par : les œuvres d'Erkin et de Saygun emploient par exemple le rythme irrégulier « aksak ». Mais on trouve des procédés d'écriture plus contemporains, polytonalité comme dans le Trio de Tihanyi ou le Quintette de Slavenski, et de l'humour maîtrisé avec citations bienvenues et drôles comme dans le dialogue entre cor et flûte de . Avec des modes de jeu diversifiés propres aux Balkans comme le suggère celui de la clarinette dans Danse des Balkans de Marko Tajčević.

Le compositeur serbe Milan Mihajlovič, présent dans la salle, était le compositeur associé à cette manifestation originale ; il mérite largement cet honneur, car son langage très personnel nous entraine dans un univers poétique qui n'appartient qu'à lui. Le début de ses pièces requiert toujours une attention soutenue car il est minimaliste la plupart du temps, même si ce début met en place l'élément moteur de la composition : c'est une note comme dans Elégie pour violon et piano, c'est un intervalle comme dans la création mondiale présentée samedi. Par la suite, les compositions se déploient avec douceur ou violence, mais toujours avec une écriture délicate et sans redondances.

Les interprètes, qui alternent dans des formations très diverses, sont tous de haut niveau et très soucieux de livrer le meilleur de chaque composition. On retiendra la performance du pianiste Oliver Triendl qui est présent dans la plupart des morceaux, et qui est l'initiateur d'un festival balkanique à Kempten, en Bavière. On applaudit le violoncelliste Jakob Koranyi, plein de sensibilité dans la sonate de Ligeti, on remarque les sonorités si diverses du clarinettiste Matthew Hunt, on apprécie le lyrisme de Lily Francis dans l'Élégie de Dora Peljačević et l'engagement de Cécilia Zilliacus dans le duo Vardar du bulgare Vladigerov. Le contrebassiste Petru Luga joue avec virtuosité de son instrument et le corniste Hervé Joulain manie aussi bien l'humour que la sourdine !

Des musiciens venus de tous les coins de l'Europe pour faire connaitre des opus des contrées oubliées de l'Europe, quelle belle image pour ces temps troublés

Photos de haut en bas : , Jakob Koranyi et Lily Francis (c) DR

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