La vie d'Henri Marteau fut digne d'un roman rocambolesque.
Violoniste virtuose né d'un père français et d'une mère allemande, ancienne élève de Clara Schumann, il fut le sujet de tracasseries à répétition que l'auteur de l'excellent texte de présentation de cette livraison, Joachim Draheim, détaille généreusement et passionnément. Il donne d'importantes informations sur ses tournées (Europe dont Pays scandinaves, Russie, Amérique), ses rencontres, les centres où il enseigna (Genève, Berlin où il succéda à Joseph Joachim, Leipzig, Dresde, Prague) et ses compositions. On peut ajouter qu'Henri Marteau côtoya un temps le Danois Carl Nielsen en 1896 et interpréta sa Sonate pour violon et piano n° 1 dont il reçut la dédicace. Plus largement, le violoniste français défendit un vaste répertoire. Une vie de succès domina son riche parcours jusqu'en 1914, puis survinrent moult difficultés à s'imposer après ses mésaventures liées à ses origines dans un climat patriotique intolérant. Mais, globalement, son parcours fut exceptionnellement riche.
Sa musique ne domine pas vraiment le répertoire incluant le violon, se cantonnant à une écriture irréprochable à laquelle manquait trop souvent la marque du génie comme le confirme le programme de cet enregistrement. Un peu à part et moins conventionnel, son opus 10 Huit Lieder pour une chanteuse et quatuor à cordes (1905) où domine nettement « An Agnes » sur un texte de Nikolaus Lenau, ici magnifiquement chanté par Julie Kaufmann. Max Reger, grand ami d'Henri Marteau qui composa à son intention, est représenté par Deux Pièces pour violoncelle et piano composées en 1901. Les instrumentistes célèbrent ces partitions peu fréquentées avec brio et leur lecture précieuse nous aide à compléter une page intéressante de l'histoire de la musique du continent européen.