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Vivaldi par les Cris de Paris

Coïncidence ? Quelques mois après Hervé Niquet et le Concert spirituel, et font paraître chez Ambronay un album dédié à la musique sacrée de Vivaldi, pour voix de femmes.

L'idée de donner sans voix d'hommes les œuvres composées pour l'Ospedale della Pietà à Venise, pas nouvelle au concert pour Les Cris de Paris, procède de véritables recherches musicologiques, synthétisées par dans le livret : Vivaldi aurait en fait conçu ces œuvres à l'origine pour voix de femmes seules, et les aurait adaptées pour chœur mixte à des fins de diffusion, seules ces dernières versions nous étant parvenues.

Cette tentative de reconstitution des partitions d'origine par se double ici d'une reconstitution fictive d'une « messa intiera » vénitienne, c'est-à-dire un enchaînement Kyrie, Gloria (ici le fameux Gloria RV 589) et Credo, agrémentés ici de deux sinfonias et du célèbre Magnificat (dans sa version à double chœur comme chez le Concert spirituel). On n'a aucune certitude que ces pièces aient été destinées à être jouées ensemble, mais leur enchaînement crée une unité inédite et très intéressante, renforcée par la réapparition d'un même motif de 13 mesures, enchaînement d'accords dissonants qu'on retrouve dans le Kyrie, le Credo, le Concerto et le Magnificat.

Alors que Hervé Niquet avait pris le parti d'exécuter les parties solo en chapelle, Geoffroy Jourdain confie les soli à pas moins de sept chanteuses différentes, fidèle à ce qu'il nous confiait lors d'un entretien en 2009 : « Aux Cris de Paris, j'ai longtemps essayé de faire en sorte qu'il n'y ait pas de soliste attitré mais que chacun puisse être à un moment soliste ». L'accompagnement instrumental est fourni, bien présent, alerte. L'ensemble est de très bonne tenue et sonne bien. Certains passages dans les œuvres célèbres sont très réussis (le « Deposuit potentes » dans le Magnificat ou un « Domine Deus » avec hautbois dans le Gloria, par exemple), et on apprécie la beauté et la ferveur des moins connus Kyrie et Credo. Le chœur, céleste et juvénile, manque hélas parfois un peu de précision dans l'articulation, pas aidé par une prise de son assez lointaine. Et si certains passages peuvent paraître plus neutres ou manquer d'énergie (« Et in terra pax » dans le Gloria), ils sont bien contrebalancés par les soli variés, où les voix de jeunes femmes, celle d' en tête, font entendre leurs multiples couleurs.

Une approche enthousiasmante et originale de Vivaldi qui vaut le détour.

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