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L’Arsenal de Metz en fête avec La Senna festeggiante de Vivaldi

Interprétation de choc pour le plus français des ouvrages vocaux profanes de Vivaldi. Avec et des solistes de renom, l'ambiance de ce concert était à la fête.

Des huit « serenate » composées par Vivaldi, la plus longue et la plus développée est très certainement La Senna festeggiante, même si les circonstances de production de cet hommage appuyé au jeune Louis XV demeurent largement mystérieuses. Vraisemblablement créé à Venise lors de l'été 1726, à l'occasion d'une commande de l'ambassadeur de France, l'ouvrage raconte en effet, sur le mode allégorique, le retour au royaume de France de L'Âge d'Or et de la Vertu. Allusion assez peu diplomatique, certes, aux turpitudes de la Régence et à la vie dissolue de Philippe d'Orléans, neveu de Louis XIV ! Le style inhabituellement « français » d'une pièce marquée par une orchestration atypique pour l'Italie, ainsi que par des rythmes peu fréquents chez le Prêtre roux, en fait un morceau tout à fait à part dans la production vivaldienne, et le public de l'Arsenal a réservé un triomphe à ce concert fort heureusement capté par la chaîne Mezzo, que les téléspectateurs mélomanes auront donc l'occasion de visionner dans les prochains mois.

On ne pouvait rêver, il faut bien le dire, d'une meilleure interprétation. Seul petit bémol, les vocalises parfois approximatives de la contralto , pourtant spécialiste de la musique de Vivaldi où elle est généralement très appréciée pour le caractère rocailleux et caverneux de ses graves. Généreux lui aussi de ses graves, et brûlant les planches de son élégante présence, la basse a fait forte impression par la qualité de son chant, la beauté de sa voix et la clarté de sa diction. À un niveau supérieur encore la grande Karine Gauvin, égérie du public « baroqueux » depuis quelques années déjà, a enchanté le public messin par la rondeur de son pulpeux soprano, par son exquise musicalité et par le goût raffiné de ses ornementations. À la tête du l'ensemble , le chef a su très bien rendre le caractère « français » de cet ouvrage de Vivaldi, nous épargnant les excès de fougue et les traits hystériques qui ont tendance aujourd'hui à devenir la norme dès lors qu'on exhume une œuvre peu connue de Vivaldi. On a hâte de réentendre ce bel ouvrage, donné dans des conditions aussi proches de l'idéal.

Crédit photographique : © Michael Slobodian

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