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Éliane Reyes et Jean-Claude Vanden Eynden captivants pour Brahms

Les pianistes belges et enregistrent la Sonate pour deux pianos de Brahms, œuvre phare du répertoire romantique pour deux pianos et ressuscitent les sonates de deux proches de Brahms aux styles bien différents : et .

L'histoire de la Sonate pour deux pianos de Brahms est connue : lorsqu'il compose en 1861 son quintette à cordes pour deux violoncelles, Brahms se montre insatisfait et, encouragé par Clara Schumann, en propose une version pour deux pianos (1863), qu'il remanie par la suite en quintette pour cordes et piano (1864-65). À la suite de quelques enregistrements (Marie-Joseph Jude et Jean-François Heisser par exemple), ce disque nous rappelle pourtant que la sonate est plus qu'une réduction pour pianos, étape dans la genèse difficile du quintette. , professeur et pianiste très actif en musique de chambre, et , à la discographie variée (Chopin, Tansman, Bacri…), nous en donnent une version à la fois dramatique, puissante et expressive. Ils parviennent à transmettre l'écriture polyphonique très dense, particulièrement dans le long Allegro initial et le Final, sans perdre pour autant le fil du thème principal, grâce à des échanges fluides entre les voix et les deux pianos. L'ensemble laisse une impression de belle texture sonore, différente mais aussi riche que celle d'un ensemble à cordes. Et si le deuxième mouvement peut paraître monochrome, malgré toutes les intentions musicales apportées par les pianistes, le Scherzo, en revanche, est tout à fait saisissant et prend progressivement une dimension presque symphonique sous les doigts d' et , à l'instar du Final qui le suit.

Après cette œuvre fleuve (plus de 40 minutes malgré l'absence d'une reprise) et puissante, la petite sonate de contraste pas son style plus proche du romantisme de Mendelssohn ou de Schubert. De ce compositeur et professeur allemand aujourd'hui oublié, c'est la musique de chambre (ses Trios) que l'on retient malgré ses incursions dans la musique symphonique et religieuse. Les interprètes rendent ici justice à cette sonate (prévue pour quatre mains, mais le jeu sur deux pianos offre en général plus de possibilités), à son écriture classique mais fine et aux mélodies délicates, dans l'entraînante badinerie de l'Allegro ou la douce tristesse du Lento. « Nul doute que cette couleur pastel ne fit rien pour imposer l'œuvre dans un XXe siècle rugissant et réclamant le Sturm und Drang généralisé qui fera sa marque » note avec justesse le compositeur dans le livret concis.

Autre compositeur méconnu, l'Autrichien est encore parfois joué pour sa musique d'opéra (Das Goldene Kreuz composé en 1875 fut un succès) ou sa Symphonie op. 31. L'Allegro de sa Sonate op. 21 nous ramène vers Brahms, avec ses crescendos et son écriture verticale d'accords plaqués, avant de retrouver un ton plus anodin mais charmant dans les trois mouvements suivants.

Éliane Reyes et Jean-Claude Vanden Eynden nous offrent donc ici un Brahms captivant et relativement peu enregistré ainsi que le plaisir de la découverte d'œuvres rares, quoiqu'inégales.

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