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À Genève, Dvořák à la fête avec Truls Mørk et Tomáš Netopil

Le public réserve un triomphe à la magnifique prestation de la Philharmonie Tchèque sous la direction inspirée et dynamique du jeune chef , qui sublime le violoncelliste dans le Concerto pour violoncelle d'.

Il y a des moments comme ça. Dès les premières notes d'un concert, on pressent qu'il se passe quelque chose autour de l'orchestre, entre le chef et ses musiciens, dans l'ambiance du public, dans son silence ou dans son murmure, comme un courant indéfinissable qui annonce que tout est réuni pour que la musique soit à la fête.

Et c'est bien ce qui se passe dès les premières mesures de Jalousie, ce tableau symphonique que avait pensé utiliser pour l'ouverture de son opéra Jenůfa. D'emblée, on est ébahi par la cohérence musicale de la Philharmonie Tchèque. La brillance de cette courte ouverture permet d'un « clin d'oreille » d'apprécier le son de cet orchestre : un son dont l'homogénéité et la précision forcent l'admiration.

Et c'est surtout, comme dans le Concerto pour violoncelle de Dvořák, quand la Philharmonie Tchèque se place en accompagnateur qu'on en apprécie la qualité. Parce qu'avec et sa musicalité à fleur de peau, avec ses pianissimi d'une si belle légèreté, d'une si grande intensité, seul un orchestre exceptionnel peut répondre à ces appels musicaux. Dans ces moments-là, l'effleurement des archets, le souffle de cuivres et des bois sont si ténus qu'on voit les musiciens jouer leurs instruments alors que le son ne semble que suggéré. Certes, ces climats doivent beaucoup aussi au violoncelle de . Alors que le violoncelliste norvégien semble prendre place sur scène dans l'impassibilité, il s'anime dès que retentissent les premiers accords. Balançant légèrement le corps au rythme de l'orchestre, on le sent tout à coup impatient de se joindre à l'ensemble pour prendre part à la fête musicale. Sur le podium, le chef tchèque lance l'invitation. Irrésistiblement ! C'est le son, magnifique, d'un cor qui bientôt surgit de la masse, un son qui se fond bientôt de nouveau dans l'orchestre. C'est un véritable miracle musical : tire de son orchestre des couleurs superbes. Il n'y a plus de cordes, plus de bois, plus de cuivres, mais un seul instrument : l'orchestre. Et la complicité entre le violoncelle de Truls Mørk et le chef d'orchestre fait merveille. Un parfait binôme de musiciens, fondé sur le respect mutuel et le respect de l'œuvre, et porté par un orchestre inspiré.

Dans la Symphonie n° 8 d', la place reste à la musique, avec toujours cet orchestre dont la cohésion musicale est remarquable. Ici, le chef use de son instrument avec un sens aigu de la mélodie. Le geste large, le corps en mouvement, Tomáš Netopil donne l'impression d'avoir une confiance sans borne en son orchestre. Son visage reste serein, souriant, comme amusé d'entendre cette musique jouée avec tant de nuances. Avec des contrastes dont il abuse parfois, quand bien même on réalise qu'il ne cherche pas l'effet pour amuser la galerie. On se souviendra des deux derniers mouvements, menés avec une énergie débordante d'enthousiasme.

Un bis enlevé, la Danse hongroise n° 5 de , clôt ce premier concert de la 69e saison du Pour cent culturel de Migros, et réjouit le public qui réserve un triomphe amplement mérité aux protagonistes d'une soirée exceptionnelle.

Crédit photographique : Truls Mørk © Stéphane de Bourgies / Virgin Classics

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