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Maria by Callas, le film des quarante ans

A l'occasion du 40e anniversaire de la disparition de Maria Callas, le film Maria by Callas fait partie d'un projet multiforme du même nom de Tom Volf. Censé permettre de découvrir la « femme derrière la légende, intime et inédite (…) la femme fragile et l'artiste acharnée de travail « (sic), ce projet se décline à travers une exposition, trois livres et une collection d'enregistrements. 

Le film, documentaire de 90 minutes, a été présenté au festival de Cannes en mai 2017. A côté de quelques images très connues, on découvre de nombreux documents inédits. Tom Volf a en effet passé trois ans à rencontrer les proches de la diva, ceux qui l'ont bien connue, et à récolter des photos, des lettres, des films Super 8 pris lors d'après midi entre amis… Le résultat est assez spectaculaire, même si la qualité des images est aléatoire, ce qui est parfaitement compréhensible étant donné la provenance disparate de ces matériaux. Lors de la projection presse, le film n'avait pas fini d'être colorisé. On aurait bien conseillé au réalisateur de ne pas aller plus loin, car le choc visuel et émotionnel entre une sorte de confort visuel, où on peut admirer le moindre détail d'une tenue ou d'un bijou (que Callas était donc élégante !) et brusquement l'apparition d'un noir et blanc d'archives, nous rend plus palpable encore la réalité et la vulnérabilité de l'être humain.

Qui d'autre que , qui a incarné la divine dans la pièce de théâtre Master Class en 1996 et dans le film Callas Forever, en 2002, pouvait lire les lettres, très intimes, que la chanteuse a envoyé à sa professeure chérie, Elvira Hidalgo ? Les textes détaillent ses préoccupations de femme, et surtout, on y entend une magnifique lettre d'amour envoyée à Aristote Onassis. La voix chaude de l'actrice, sa diction sophistiquée, rendent à merveille les tourments de l'âme de la cantatrice.

Ce documentaire n'est pas l'œuvre d'un musicologue, il s'intéresse beaucoup plus à la vie privée de la diva qu'à son art. Malgré les extraits vocaux, pour la plupart fort connus, le film rend surtout compte d'événements ayant eu un fort retentissement médiatique : le scandale de son annulation à Rome en 1958, sa relation avec Aristote Onassis, et curieusement très peu celle avec Meneghini, qui fut pourtant un homme important de sa vie.

La colonne vertébrale du film est constituée d'un entretien télévisé avec David Frost, réalisé en 1970, dont personne n'avait gardé trace, hormis son majordome Ferruccio. On y retrouve une femme soucieuse d'expliquer son art, et les exigences qu'il implique. C'est de là, de ses propres mots, ceux de son histoire racontée par elle même, que provient le titre Maria by Callas. On ne peut également s'empêcher de penser que la condition féminine à bien changé depuis les fifties. Ces quelques phrases où elle explique qu'elle aurait été plus heureuse en fondant une famille plutôt qu'en devenant une icône adulée de l'art lyrique font froid dans le dos !

Tom Volf s'est proposé de torpiller le mythe de la diva hautaine et capricieuse, d'y substituer l'image d'une femme en proie au doute et profondément blessée. C'est tout à fait louable, mais d'autres avant lui avaient déjà accompli ce travail, et le regard du public sur a bien changé ces dernières décennies. Peut-être ce qu'on appelle « le grand public » y trouvera-t-il quelque chose de neuf. Pour les fans avertis, il s'agit toutefois d'un grand moment d'émotion.

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