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Déconcertante évolution esthétique d’Isabelle Faust dans Mendelssohn

L'évolution d' vers un style de jeu historiquement informé conduit la grande violoniste allemande à des choix esthétiques pour le moins surprenants et bien peu convaincants. Son concerto de Mendelssohn est une réelle déception, qui contraste avec la réussite de la symphonie figurant sur le même disque.

Voici un disque déconcertant. Nul plus que l'auteur de ces lignes n'admire , dont certains enregistrements antérieurs, notamment les sonates et partitas de Bach ou les concertos de Beethoven et Berg avec Claudio Abbado, figurent parmi les trésors de toute discothèque. Mais son évolution actuelle plonge les auditeurs dans la perplexité. Le texte de présentation de ce CD dérangeant explique que Ferdinand David, le créateur du concerto de Mendelssohn en 1846, jouait vraisemblablement sans vibrato mais en usant de nombreux portamentos : soit. Peut-être cette approche est-elle « historiquement informée », mais le résultat est en soi quasiment inaudible, surtout dans l'admirable andante, déformé au point d'en être méconnaissable. Moins atteints, les deux mouvements extérieurs manquent cependant de corps et de substance, tant le son de l'interprète paraît volontairement anémié.

Paradoxalement, le meilleur de ce disque, passé cette déception, réside bien dans la Symphonie « Réformation », cinq cents ans exactement après l'affichage des thèses de Luther sur la porte de l'église de Wittemberg. La lecture de avec son orchestre de Freibourg claque et sonne comme jamais ; les cuivres sont particulièrement mis en valeur dans cette conception brillante et vivante qui renouvelle notre perception du chef d'œuvre. Certes, on ne renoncera pas à chérir les références historiques laissées avec les grands orchestres traditionnels sous les baguettes inspirées de chefs comme Abbado, Karajan, Masur ou Sawallisch voire, plus près de l'esthétique actuelle, Gardiner. De même, l'Ouverture « Les Hébrides » bénéficie d'un climat envoûtant recréé dès les premières mesures, même si, là encore, le souvenir des visions romantiques de Furtwängler ne sera pas effacé par cette interprétation. Ce nouveau volume d'une intégrale symphonique en cours, on l'aura compris, vaut plus pour la symphonie que pour le concerto. Pour ce dernier, cette interprétation marginale ne peut prétendre rejoindre les références d'une esthétique classique. Heifetz, Menuhin, Oistrakh et autres Vengerov peuvent dormir tranquilles…

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