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Michael Tilson Thomas interprète les symphonies de Schumann

Fin octobre, le chef américain a annoncé son départ de la direction musicale du à la fin de la saison 2019-2020. Bien que la décision ait été prise, l'artiste ne renonce pas à ses projets, et continue à graver des disques pour le label qu'il a fait fonder au sein de l'institution dont il est le chef principal depuis 1995. Son nouvel enregistrement est une présentation des quatre symphonies de . Parcours ambitieux, mais inégal.

Nous sommes saisis par les couleurs de l'orchestre : par un large éventail (tout comme celui qui figure sur la couverture de l'album) de timbres sombres se déployant dès le début de la première symphonie, et persistant jusqu'aux derniers accords de la quatrième. La massive pâte orchestrale attire par la profondeur des sonorités et son relief, au grain dense et homogène.

En ce qui concerne les émotions, nous en manquons malheureusement dans les trois premières symphonies, et ce, tout autant dans une perspective globale que dans certains moments où l'on souhaiterait entendre plus de tension. C'est ainsi que, sous la baguette précise de , les symphonies n° 1 (surnommée « Le Printemps ») et 2 sont dénuées de vivacité et d'enthousiasme, de cet engagement physique qu'on a pu percevoir dans la première intégrale de Leonard Bernstein ou, plus récemment, dans la prestation contestable, mais révolutionnaire, de Vladimir Ashkenazy. Pour la troisième symphonie, la « Rhénane » (chronologiquement la dernière des quatre symphonies de Schumann), telle une ballade épique dont une clef interprétative intéressante a été offerte par Carlo Maria Giulini, l'auditeur devra se contenter de phrasés lourds plutôt que narratifs, ainsi que de contrastes dynamiques pâles plutôt qu'électrisants.

Cependant, une approche différente attire notre attention dans l'interprétation de la quatrième symphonie. D'une part, le parcours que propose est cette fois plein d'angoisse, de cette anxiété et virtuosité (intense, pourtant pas trop extériorisée) dont font preuve les gravures mythiques des années 50 par Wilhelm Furtwängler et Hermann Abendroth (surtout dans les 1er et 3e mouvements) ; d'autre part, dans le 2e mouvement, il est débordant de lyrisme, de raffinement et de lucidité, en parfaite correspondance de caractère avec cette partition.

Avec les tempos sages dans l'exécution des trois premières symphonies compensée par une fraîcheur inattendue dans celle de la quatrième, cette réalisation de Michael Tilson Thomas est seulement correcte. Alors que de nombreux enregistrements de ces symphonies sont disponibles, il aurait fallu pouvoir proposer des interprétations permettant de redécouvrir autrement ces belles pages.

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