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Elisabeth Leonskaja splendide dans Beethoven à la Maison de la Radio

Dans le cadre d'une intégrale des concertos pour piano de Beethoven en quatre concerts, et l' invitent pour leur premier soir , qui adjoint ses deux magnifiques prestations à une rareté française portée par l'orchestre, la Symphonie n°2 de .

Quatre concerts pour cinq concertos et cinq pianistes, le tout en dix jours. Tel est le pari de en ce début 2018, auquel prendront part les solistes Alice Sara Ott, Rudolf Buchbinder, Pierre-Laurent Aimard et Bertrand Chamayou. Pour le premier soir, entre d'abord seule en scène et déploie son art du doigté et de la sobriété dans la Fantaisie pour piano opus 77 de Beethoven. La délicatesse avec laquelle la pianiste aborde l'introduction Allegro Poco Adagio n'occulte rien du magnifique allant de la partie médiane, Allegro con brio, puis du caractère presque joueur dans une partie Presto dont la mesure évite tout caractère démonstratif.

Très discrètement, la pianiste revient saluer une seule fois, puis laisse sa place à l' et à son directeur musical , qui entre d'un pas leste, habituel depuis le début de cette saison, et lance ses musiciens pour un ouvrage rare : la Symphonie n° 2 de , créée par le compositeur auvergnat après la découverte du corpus beethovénien, lors d'une retraite en son pays dont il revint non pas avec une, mais avec deux œuvres. L'accentuation montre à quel point Franck cherche à emmener vers l'Allemagne cette musique écrite entre 1830 et 1831, plutôt que d'y chercher une légèreté et un cristallin des cordes se référant au son français, style plus utilisé par les rares chefs s'étant attelés récemment à cette musique. L'Allegro vivace e energico présente surtout les qualités de la petite harmonie (superbes première clarinette et premier basson) et des cordes, agiles comme pour une symphonie de Mozart, mais avec une brillance qui évoque les pièces écrites juste avant par Weber et juste après par Mendelssohn. Le reste de l'ouvrage est dirigé de la même façon, avec un Mikko Franck que sa récente habitude de quitter sa chaise sur l'estrade conduit à diriger debout à côté du pupitre, afin de mieux faire comprendre ses gestes aux musiciens.

Au retour d'entracte, tous retrouvent la scène pour ouvrir cette intégrale des concertos de Beethoven dans le désordre, en débutant par le favori des spécialistes, le n° 4 en sol majeur opus 58. Leonskaja nous avait préparé avec la Fantaisie et ne déçoit pas à son retour. Les doigts, dès l'introduction en solo, présentent une souplesse pleine de grâce, qui jamais ne cherche à se mettre en valeur mais plutôt à servir la musique d'un génie. Mikko Franck l'accompagne avec la même finesse, concentré sur la pianiste pour ne jamais s'en écarter, ni l'étouffer par les sonorités chaudes des cordes du Philharmonique de Radio France.

L'Andante con moto montre un même accord entre chef et soliste, et Franck s'attelle avant tout à laisser la primauté à Leonskaja dans un mouvement qui fait du piano un élément structurant, avec une notion presque vocale de sa partie. Cette distinction ne cherche pas à tout prix la profondeur émotionnelle, ni encore moins un sentiment nostalgique, mais laisse flotter le temps avant que tous ne reprennent le dynamique Rondo. Les applaudissements n'y feront rien, Leonskaja ne souhaite pas offrir un bis qui risquerait de pâtir de la fatigue du clavier après une telle prestation.

Crédit photographique : © Julia Wesely

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