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Créations faites maison par le Ballet de Stuttgart

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Stuttgart. Schauspielhaus. 29-IV-2018. Les Cinq fantastiques (créations pour le Ballet de Stuttgart).
1. Under the surface : chorégraphie et décor de Roman Novitzki ; musique : Marc Strobel, Stephin Merritt, Ólafur Arnalds.
2. Or noir : chorégraphie, décor et costumes de Fabio Adorisio ; musique : Nicky Sohn.
3. Take your pleasure seriously : chorégraphie, décor et costumes de Katarzyna Kozielska ; musique : Johann Sebastian Bach, Borut Kržišnik, Särmä.
4. Skinny : chorégraphie, décor et costumes de Louis Stiens ; musique : Halcyon Veil, Der Kindestod.
5. Almost Blue : chorégraphie de Marco Goecke ; décors et costumes de Thomas Mika ; musique : chansons interprétées par Etta James, Antony and the Johnsons.
Avec : Alice Amatriain (3), Elisa Badenes (4, 5), Martí Fernández Paixà (3), David Moore (2, 4), Jason Reilly (2, 3), Angelica Zuccarini (4, 5), solistes et corps de ballet du Ballet de Stuttgart.

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Le talent et l'engagement des danseurs du Ballet de Stuttgart sont là, mais les chorégraphes n'ont guère de pistes nouvelles à proposer.

Die fantastischen FünfLa culture musicale, dans le monde de la danse, n'est pas le bien le mieux partagée. Pour terminer ses deux décennies de direction au Ballet de Stuttgart, Reid Anderson a choisi de consacrer une soirée à des chorégraphes éminemment liés à la compagnie : quatre d'entre eux sont danseurs dans la troupe, le cinquième, , y est chorégraphe en résidence depuis 2005. Il n'est pas sûr que la soirée donne des perspectives très brillantes sur l'avenir de l'art chorégraphique, mais elle est n'est guère stimulante pour ce qui est du rapport entre danse et musique.

Les deux premières pièces de cette très longue soirée, celles de Roman Novitzky et de Fabio Adorisio, se situent dans une longue tradition de pièces qui étudient sur un mode émotif plus que très construit les rapports interpersonnels, a fortiori les séductions et les rejets qui jalonnent les relations entre hommes et femmes – est-ce un hasard si ces deux pièces sont créées cette saison où le (pesant) modèle du genre, Dances at a Gathering de Jerome Robbins. Dans la pièce de Novitzky, interprétée par une belle troupe de huit jeunes danseurs, une table en fond de scène sert de lieu fixe à partir duquel les rencontres vont partir, mais l'atmosphère est particulièrement proche de Robbins, humour compris. Dans celle d'Adorisio, sur une musique particulièrement sirupeuse (interprétée par un quintette à cordes et non enregistrée comme le reste du programme), la dramaturgie est un peu plus variée, avec un travail collectif plus intéressant et une construction des passages solistes moins ancrée dans l'anecdote amoureuse, et un peu plus de virtuosité. Les deux pièces, cependant, partagent aussi un très fort ancrage dans la technique classique – on est, après tout, au Ballet de Stuttgart – et ceci n'est certainement pas un mal.

La pièce suivante est de très loin la plus intéressante du programme. La musique n'y est qu'inoffensive, ce qui est un progrès, avec même quelques minutes de Bach ; la pièce de la chorégraphe Katerzyna Kozielska gagnerait à être peut-être clarifiée ou condensée, mais elle propose une très belle danse, qui a elle aussi ses références (la Sirène du Fils prodigue de Balanchine ?). Le duo entre et est sans surprise le grand moment de l'ensemble de la soirée car les chorégraphes ont pu travailler avec les grands noms de la troupe actuelle, et c'est ce qui sauve beaucoup de moments plus faibles.

Die fantastischen FünfLe point noir du spectacle intervient juste après ce beau moment : Louis Stiens, danseur attachant, a choisi de mettre en danse une obscure pièce du groupe électronique Halcyon Veil, diffusée sans pitié pour les oreilles des spectateurs (il est de coutume, dans ce cas, de distribuer des bouchons d'oreille !). Les pièces de Thom Willems pour Forsythe ont sans doute joué dans le choix de cette bande-son riche en bruits industrielles, et la chorégraphie elle-même peut faire penser de loin à Forsythe, tout en en extrayant surtout les stéréotypes : vitesse, froideur, traitement du corps comme une mécanique. Il y manque la rigueur formelle, l'audace de l'abstraction, le lien puissant et critique avec toute l'histoire de la danse qui donnent aux pièces de Forsythe tout leur sens.

Avec la pièce de (lire notre entretien) qui clôt le programme, on revient dans des eaux plus familières, et à vrai dire presque trop : comme dans la première pièce, Almost Blue est rythmée par une litanie de chansonnettes jazz ; leur défaut n'est pas seulement dans leur banalité, mais dans leur brièveté qui hache les vingt-huit minutes que dure la pièce. Les mouvements saccadés où les membres sont alternativement en pleine extension ou repliés comme des pattes animales, la noirceur des costumes, les contrastes des lumières sont la marque de fabrique de Goecke, qui cessera avec l'arrivée de la nouvelle direction d'occuper le poste de chorégraphe en résidence. Le manque de structure de la pièce et sa durée font vite percevoir tout cela comme une forme de maniérisme, que le public de Stuttgart semble apprécier, mais qui ne constitue certes pas une piste d'avenir pour cet objet d'entre-deux qu'est la danse contemporaine pratiquée par les compagnies classiques.

Crédit photographique : ©

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Stuttgart. Schauspielhaus. 29-IV-2018. Les Cinq fantastiques (créations pour le Ballet de Stuttgart).
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3. Take your pleasure seriously : chorégraphie, décor et costumes de Katarzyna Kozielska ; musique : Johann Sebastian Bach, Borut Kržišnik, Särmä.
4. Skinny : chorégraphie, décor et costumes de Louis Stiens ; musique : Halcyon Veil, Der Kindestod.
5. Almost Blue : chorégraphie de Marco Goecke ; décors et costumes de Thomas Mika ; musique : chansons interprétées par Etta James, Antony and the Johnsons.
Avec : Alice Amatriain (3), Elisa Badenes (4, 5), Martí Fernández Paixà (3), David Moore (2, 4), Jason Reilly (2, 3), Angelica Zuccarini (4, 5), solistes et corps de ballet du Ballet de Stuttgart.

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