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Au Musée Berlioz, les images d’un iconoclaste

Mobilisant trois salles richement documentées au sein de la maison-musée consacrée à , l'exposition « Les images d'un iconoclaste » traite de deux innovations importantes du siècle romantique : l'art du portrait photographique d'une part, l'art de la caricature d'autre part.

Le portrait se généralise au milieu du XIXe siècle et démocratise la représentation de soi. La caricature, liée au développement de la presse à la même époque, contribue au même titre que la photographie à la célébrité de celui qui est pris pour cible.

On a reconstitué dans la vitrine de la première salle un atelier de photographie, avec l'appareil sur son trépied et le fauteuil pour la pose, où a pris place . Supplantant la peinture de portraits et sa clientèle aristocratique, la photographie assure un gain de temps considérable et une ressemblance garantie ! Nadar, Étienne Carjat, Eugène Disdéri, Pierre Petit en sont les ambassadeurs, photographiant notables, bourgeois et artistes. Disdéri lance le portrait « carte de visite » ou « photos-cartes », réduisant encore le coût et le temps de pose. Un « trombinoscope » de quelques cent vingt personnalités, composant la société bourgeoise et artistique du XIXe siècle (hommes politiques, écrivains, peintres, musiciens, chefs d'orchestre, journalistes, interprètes, etc.) occupe le mur face à la vitrine.

La seconde salle – À la charge ! – concerne la presse satirique. Le XIXe siècle est l'âge d'or de la caricature, désignée alors sous le nom de charge. Cham, Gustave Doré, Benjamin Roubaud, Honoré Daumier, Étienne Carjat exercent leur savoir-faire mordant, mais toujours au bénéfice des têtes caricaturées. Le Charivari en 1832, Le Journal pour rire en 1848, le Journal Amusant en 1856, Le Monde pour rire ou Diogène en 1868 se spécialisent dans la contrefaçon. Le scandale des « poires » (quatre croquis de Louis-Philippe se métamorphosant en poire) entraîne la condamnation de Charles Philipon, directeur du journal La Caricature. Un attentat commis sur la personne du roi provoque le rétablissement de la censure en 1835.

Caricaturer les artistes semble moins dangereux ! Dès 1830, Berlioz devient la cible de nombreux dessinateurs : son nez aquilin, sa chevelure généreuse et sa musique extravagante sont autant de traits retenus par les as du crayon. On le voit diriger avec un poteau du télégraphe électrique un orchestre dont chaque exécutant occupe un pays différent. Célèbre est cette affiche d'un concert « fracassant » qui s'entend en Europe centrale, où les cuivres voisinent les canons. Le Journal amusant lui consacre une édition intégrale après Les Troyens à Carthage (1863), opéra qui n'a pas manqué de décontenancer interprètes et public. Ses collègues et suiveurs n'échapperont pas à la satyre, en lien avec leur musique et leurs obsessions. Ainsi Wagner, dans L'Eclipse, burinant une oreille, ou encore Bizet, apparaissant en pêcheur de « perles » avec son épuisette dans Diogène

Berlioz se gardera toujours d'évoquer les caricatures dont il fait l'objet, même dans ses Mémoires, preuve qu'elles ne devaient pas trop l'importuner. Par contre, il refuse le portrait, d'une haute tenue pourtant, peint par Gustave Courbet. Le personnage l'insupportait !

Crédits photographiques : ©

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