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Gustavo Dudamel et le Mahler Chamber Orchestra dans Mahler

Les unes après les autres et sans suivre leur ordre chronologique, interprète les symphonies de et réussit particulièrement la Quatrième à la Philharmonie de Paris, lors d'une tournée de début d'année avec le et la soprano .

L'évènement a été peu visible en Europe, mais en mai 2017 au Walt Disney Concert Hall, a dirigé en quatre soirs le Los Angeles Philharmonic dans toutes les symphonies de Schubert, ces concerts étant toujours complétés par des lieder de Mahler. Pour une tournée de quelques dates avec le , il associe à nouveau les deux compositeurs et propose à Paris d'abord la Troisième de l'aînée autrichien, puis la Quatrième du cadet.

L'ensemble possède le titre de « Chamber », mais malgré une formation à douze premiers violons puis deux pupitres de moins par groupe de cordes, la proposition massive de Dudamel fait porter sur l'œuvre de Schubert l'ombre de Beethoven. L'orchestre y présente dès l'Adagio maestoso de superbes sonorités, bien que la première flûte se montre un peu trop énergique par rapport au reste du groupe. L'Allegretto convainc peu et l'on sent que, sans tradition germanique, le chef ne semble pas savoir que faire de ce mouvement. Il retrouve de la verve au Menuetto et surtout une magnifique célérité pour le Presto vivace, notamment grâce à sa rigueur rythmique habituelle, d'une incroyable précision sans que pourtant la main droite n'expose jamais une battue trop droite, ni encore moins rigide.

Le retour d'entracte présente un orchestre qui ne possède plus de chambriste que le nom, pour s'atteler, avec seize premiers violons, à la première d'une longue liste de 4ème de Mahler prévues cette saison à Paris. Les deux premiers mouvements intéressent sans non plus passionner à outrance. Le superbe premier violon n'ose pas suffisamment désaccorder son second violon pour le Ländler, et c'est donc en douceur que se pose la caricature, comme au Bedächtig initial Dudamel ne force jamais le trait et n'appuie jamais les attaques de cordes. L'interprétation monte véritablement en puissance au Ruhevoll, dans une proposition étale, à la manière de celles osées dans l'œuvre par le créateur de l'orchestre, Claudio Abbado. Difficile après un tel mouvement de trouver Dudamel trop distancié comme on peut encore souvent le lire de la part de ceux qui, à le considérer comme un chef trop marketé, en oublient la personnalité profondément timide et intériorisée d'un artiste totalement à sa place parmi les plus grands aujourd'hui.

D'une sublime intériorité, l'adagio ne recherche nulle douleur, mais il laisse l'esprit s'échapper vers un espace méditatif rarement atteint avec autant de pureté, tant par les chefs que par les orchestres. Cette après-midi de septembre, la petite harmonie et notamment son cor anglais, sa clarinette basse et son premier basson, comme tout le groupe de cors et toutes les cordes graves − tout particulièrement dans la délicatesse des pizzicati − permettent une véritable élévation jusqu'au retour du mode majeur à la coda. La soprano , inconnue en France mais repérée depuis quelques saisons par les amateurs en déplacement régulier à la Bayerische Staatsoper, offre au dernier mouvement une proposition en phase avec ce que recherchait Mahler dans la composition de ses lieder autonomes du Knaben Wunderhorn. Elle s'amuse alors avec l'ouvrage, parfaitement récité malgré une voix relativement petite pour une salle bien mieux adaptée aux instruments qu'au chant. L'accent de la soprano montre que l'allemand n'est pas sa langue d'origine, mais le voile en fond de gorge rappelle avec plaisir celui d'une Hendricks auparavant ; et plutôt qu'une clarté de colorature, Schultz propose un rendu lyrique d'une céleste volupté.

Crédit photographique : © Vern Evans

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