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En Lubéron, Renée Fleming dans toute sa gloire

Dans un lieu à la fois grandiose et intime, situé dans les carrières du Château du marquis de Sade, à Lacoste en Lubéron, la grande et belle soprano américaine a offert au public un feu d'artifice vocal. La voix s'est élevée comme une féerie dans la magie de ce récital nocturne. Sensuelle et vibrante, a mis le public à ses pieds. Elle était accompagnée au piano par l'excellent . Celui-là même qui a accompagné de 1982 à 1992 l'immense Dietrich Fischer-Dieskau a montré un jeu subtil et délicat, respirant au rythme de la soprano : un ravissement d'élégance et de finesse.

Le récital s'est ouvert sur l'Exsultate, Jubilate de Mozart. C'était une première pour la belle américaine. Si l'interprétation de cette mozartzienne accomplie a été sans faille, à la limite de la perfection, il n'en reste pas moins vrai qu'il est difficile, voire impossible de transcrire pour piano cette partition orchestrale qui, outre la virtuosité vocale exigée, est un somptueux témoignage de foi.

Ce furent ensuite pour un bouquet straussien, avec les accents bouleversants de l'aria de la Maréchale du Chevalier à la rose, avant qu'elle interprète trois des « Quatre derniers lieder » de Strauss, véritables chefs-d'œuvre écrits sur des poèmes de Josef von Eischendorf et Hermann Hesse, et ce en Suisse, où vécut les dernières années de sa vie de 1945 à 1949. Cette grande straussienne qu'est Fleming offre un travail tout en profondeur et en intimité. Le Wetter est de toute beauté, le Cäcilie poignant de mélancolie et le Morgen comme suspendu sous le ciel étoilé de Provence. Le temps semblait s'être arrêté. Ce fut un moment magique, bouleversant par la profondeur de cette sublime évocation du crépuscule du compositeur.

Après l'entracte, a fait partager au public sa passion pour Massenet. Avec sa voix de rêve, elle a su trouver l'esprit passionné de Massenet, la liberté de ton d'une Manon frémissante de passion, de sensualité et d'amour. Sa Thaïs a suscité un véritable éblouissement, comme son Adrienne Lecouvreur, son Gianni Schicchi, avec son fameux air O mio Babbino caro ou son La Wally, moins connu que les œuvres précédentes. Créé à la Scala de Milan le 20 janvier 1892, c'est le sixième et dernier opéra d'Alfredo Catalani. Il s'agit d'une adaptation en quatre actes par Illica du roman de Wilhelmine von Hillern. Cet ouvrage annonce un certain abandon du vérisme au théâtre lyrique. Pour mémoire, dans Diva, le film de Jean-Jacques Beineix, l'héroïne interprète ce personnage. Quant à Renée Fleming, elle a soulevé l'enthousiasme d'un public fasciné par la beauté des vocalises, les pianissimi à couper le souffle, le timbre magique et merveilleux, l'intelligence et les dons d'interprétation ainsi que cette grâce qui a fait d'elle l'égérie de Sir Georg Solti et l'a consacrée « Reine du Met ».

credit photographique : Prashant Sehgal

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