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Sage Sibelius

Il y a des jours, comme ça, où l’on sort de concert avec un diffus mais entêtant sentiment d’insatisfaction, sans que l’on puisse en trouver la véritable cause. Pourtant, on y était allé en confiance : un programme passionnant servi par des interprètes de très haut niveau. La technique du pianiste et le fondu orchestral étaient d’ailleurs admirables, mais… Peut-être des cors parfois faillibles, ou un timbalier déchaîné qui démarre de temps à autre une demi-seconde trop tôt ? Non, de telles vétilles ne peuvent suffire à expliquer cette impression.

Agacé, on réfléchit à ce qui peut expliquer que ce concerto enthousiasmant sous d’autres doigts n’ait pas déclenché la même exaltation en concert; l’attrait de l’œuvre se serait-il dissipé ? Et, fatale attraction, on pose alors un disque sur sa platine. Tiens, pourquoi pas Richter et Sanderling à Leningrad ?

Tout s’éclaire alors. Là où Richter, comme d’autres d’ailleurs, vit, raconte, explose, Lugansky, lui, joue seulement du piano. Très bien, certes, avec un brio jamais tapageur et une élégance dont il ne se départ jamais, même au plus fort des bourrasques musicales. Mais, si l’on peut apprécier – pourquoi pas? – cette distance de l’interprète avec l’œuvre, elle ne peut que susciter une frustration dans un concerto aussi expansif. De plus, le toucher assez plat et un peu sec varie rarement les couleurs et les accents, absence particulièrement mise en avant dans une valse op. 64 N°2 de Chopin donnée en bis, bien peu expressive, malgré un usage immodéré du rubato et le tempo « sportif » du più mosso central.

Même problématique pour la très probe Première symphonie de Sibelius par Schönwandt. Attentif aux équilibres et au juste tempo, le chef danois donne de l’œuvre une version d’une grande intégrité quant à la lettre, sans cependant réussir à instaurer véritablement le climat de l’œuvre. Dès lors, les ruptures de ton fréquentes, ne s’intégrant pas dans un souffle général, donnent l’impression d’un manque de continuité, d’un morcellement du discours.

Bien sûr, on ne peut que saluer le haut niveau technique du concert, mais, voilà, il y est des œuvres où l’on attend parfois une petite pointe d’investissement supplémentaire…

Crédit photographique : Photo (c) DR

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