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Simon Trpčeski au Louvre : Attention Jeune Talent !

C'est dans le cadre des jeudis musicaux du Louvre que le jeune pianiste macédonien donnait son premier récital parisien. Devant la recrudescence étonnante de jeunes virtuoses conditionnés comme des « bêtes de scène » ces dernières années, curiosité et scepticisme animaient sans doute le public venu nombreux écouter ce jeune interprète. Scepticisme conforté par la nationalité du pianiste – les macédoniens ne sont pas légions dans le monde musical – ainsi que par l'audace du programme, qui présentait essentiellement des œuvres très visitées et qui constitue de véritables « chevaux de batailles » pour les « virtuoses » mentionnés plus haut.

Composées entre 1835 et 1843, les scherzi de Chopin occupent une place prépondérante dans l'œuvre du compositeur polonais. Les deux derniers – opus 39 et 54 – qui inauguraient le programme ont laissé transparaître des qualités qui ont su maintenir la concentration du public agréablement surpris. Un sentiment de pudeur, une noblesse du jeu, alliés à un sens du rythme et une fougue féline, venaient habiter ces deux pièces. Simon Trpcesky a dévoilé une science de coloriste et une maîtrise de la polyphonie – ses accords sonnaient parfaitement – qui ont également magnifié le reste de la prestation. Le pianiste a fait montre d'une singularité étonnante dans le quatrième scherzo, où en jouant volontairement des fins de phrases sèches et accusant des rythmes rebondissants, celui-ci est revenu à l'étymologie du terme scherzo – scherzare = badiner – et a dévoilé un côté joueur, enfantin qui paradoxalement venait rendre peut-être plus grande la part nostalgique et parfois dramatique de cette pièce.

La sixième sonatine d'après Bizet de Busoni mettait quant à elle l'accent sur une virtuosité plus démonstrative, où l'admirable poignet du pianiste était mis à l'épreuve. Une même virtuosité et richesse des timbres habitait le praeludium (2003) de Glishic, production contemporaine écrite pour le pianiste lui-même. Première parisienne de l'œuvre où inspiration folklorique et populaire venait rythmer une musique tantôt percussive tantôt lyrique – on pense à Bartok.

Pour conclure ce premier récital, la deuxième sonateopus 36 – de Rachmaninov constituait un choix un brin impertinent tant l'œuvre requiert des dons de technicien et de musicien. Maîtrisant la partition et modérant ses ardeurs, Simon Trpceski a livré une version policée et chaleureuse, concise et fougueuse, qui, malgré le feu endiablé de son jeu – final haletant -, n'est pas tombé dans certaines facilités que n'auraient pas reniées certains de ses collègues. Un public possédé jusqu'au dernier accord et conquis par une jeunesse prometteuse sensible et intelligente.

A suivre donc !

Crédit photographique : © Lucy Fitter

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