Nous demeurons étonnés que Gabriel Fauré ait écrit tant de merveilleuses mélodies empreintes de délicatesse, de finesse, d'invention chaque fois renouvelée, car pas une ne ressemble à une autre, sur des textes qui eussent été oubliés sans son génial esprit inventif. Il faut pour les interpréter une grande force : ne pas se laisser emporter là où la rigueur est nécessaire mais savoir aussi la déborder pour en extirper toute l'ardente musicalité, l'extrême liberté. Sans jamais tomber dans la caricature ou l'excès. Ce n'est pas nouveau : ces mélodies apparemment simples, tout en recelant quelques sacrés pièges d'intonation, sont des pièges pour la voix, le goût et l'esprit.
Christine Lajarrige est une accompagnatrice de grand talent avec qui il doit être agréable de travailler. On sent une assurance dans son jeu, à l'écoute, prête à immédiatement s'adapter : elle est une sécurité sans faille pour le chanteur. Elle trouve le style juste, l'équilibre adéquat. Elle sait se faire discrète quand cela est nécessaire, mais aussi faire à point ressortir un contre chant délicat, une basse pour mettre en valeur l'harmonie fauréenne.
Il est en revanche dommage qu'on lui ait confié un piano aux timbres stéréotypés comme les chambres d'hôtel de bord d'autoroute : Gabriel Fauré ne se satisfait pas de la médiocrité.