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Magique « Résurrection » de Mahler par Abbado

Cette chronique pourrait ressembler à une recette de cuisine tant la qualité, la simplicité ressortent de ce concert : pour faire un bon concert, prenez un festival de renommée international que vous associez à un des plus grands chefs, , saupoudrez le tout d'un orchestre que certain jugerait comme idéal, vous obtiendrez une soirée mémorable.

Il n'est plus besoin de revenir sur la qualité de l', mais dans le contexte de cet enregistrement il paraît utile de faire quelques rappels historiques. Ce festival vieux de plus de 60 ans possédait son propre orchestre composé «des meilleurs instrumentistes suisses». Les enregistrements d'Ansermet et de Karajan entre autres témoignent de l'excellent niveau de cet ensemble. Toutefois il fut dissout il y a une dizaine d'année. Sur l'initiative de , l'orchestre fut reconstitué et donna son premier concert en ouverture du festival, en août 2003 avec la symphonie n° 2 « Résurrection » de dont voici l'enregistrement. L'œuvre présentée devient dès lors hautement symbolique, voici la « résurrection » d'un orchestre. Composé de membres de différents orchestres, la Philharmonie de Berlin, celle de Vienne, le Mahler Chamber Orchestra mais aussi des solistes de renom. Réunis par leur envie d'être sous la direction de , ces musiciens nous ont offert une soirée exceptionnelle sous la baguette du chef qui nous démontre une fois de plus qu'il est un grand interprète mahlérien.

Comme souvent, le compositeur rédigea un programme pour cette symphonie, destiné aux auditeurs non avertis afin de leur faciliter l'accès à son univers. Le héros symphonique, pour reprendre le terme d'Henry-Louis de La Grange, porté en terre après une dure lutte (1er mouvement), lance un regard rétrospectif sur sa vie ; au moment de bonheur (2e mouvement) succède un scherzo plein d'humour qui se transforme lentement en grand cri de désespoir. Dans le quatrième mouvement, l'espoir renaît. La voix « de la foi naïve » résonne aux oreilles de notre héros et lui promet la lumière. Mais avant de l'atteindre, il lui faut passer par les foudres d'un finale apocalyptique. Pourtant, doucement le chœur nous fera entendre « Ressusciter ! Oui, tu vas ressusciter ! ». Tout n'est plus désormais que bonheur et extase.

Claudio Abbado avoue nourrir une affection particulière pour cette œuvre et le bonheur qui se lit sur son visage durant son exécution est la meilleure illustration possible de cette affirmation. En véritable magicien, il fait ressurgir la clarté du texte musical sans jamais renoncer à l'expression musicale. Il nous fait passer des frissons à l'émotion d'un coup de baguette magique. Les passages épiques ne manquent pas dans cette œuvre ; leur parfaite exécution par cet orchestre «d'un festival» fait de l'entrée triple piano du chœur céleste au cinquième mouvement un moment inoubliable.

Ce DVD rend palpable l'atmosphère électrique de ce concert inaugural. Le public ne s'y trompe pas et nous non plus d'ailleurs. Claudio Abbado et « son » orchestre viennent d'ajouter une nouvelle page au livre des concerts exceptionnels du Festival de Lucerne.

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