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Skip Sempé, un orfèvre en Louis Couperin…

De la courte vie de , qui est pourtant un des compositeurs français majeurs de l'époque baroque, on sait en vérité bien peu de choses.

Issu d'une famille de petits propriétaires terriens de Chaumes-en-Brie, où la musique semble avoir tenu un grand rôle, il appartient à la première génération d'une illustre dynastie de musiciens, dont le représentant le plus célèbre est son neveu François Couperin, dit « Le Grand ». En 1650, et ses deux frères, François et Charles, eurent l'opportunité d'offrir, le jour de la Saint-Jacques, une aubade au compositeur et claveciniste Jacques Champion de Chambonnières, attaché à la Chambre du Roi. Les musiciens furent félicités et Louis tout particulièrement pour la qualité des œuvres jouées, dont toutes étaient de sa main. lntroduit à la cour peu de temps après par Chambonnières, Couperin sera nommé en 1653 organiste à Saint Gervais, l'une des plus grandes paroisses parisiennes. C'est son œuvre pour clavecin qui le rendra célèbre, bien que ces pièces (au nombre de 130, environ) n'aient pas été éditées de son vivant, mais rassemblées dans plusieurs recueils manuscrits. Les plus personnelles et les plus remarquables sont sans doute les préludes et les chaconnes, qui font de Couperin l'héritier des luthistes français et de la tradition contrapuntique. Certaines de ces pages, qui font un usage fréquent des dissonances, sont par ailleurs parfois empreintes d'une gravité inhabituelle. Aussi brillant organiste que claveciniste, il laisse également un nombre important de pièces pour orgue, dont peu étaient parvenues jusqu'à nous. La récente découverte en Angleterre d'un manuscrit complet, publié il y a peu, lui rend la place éminente qu'il devait occuper de fait parmi les maîtres de l'orgue en France au XVIIe siècle. En outre, la musique pour clavecin de Couperin se caractérise par une virtuosité débridée et un jeu passionné, qu'il avait en commun avec son cadet Marin Marais (1656- 1728), grand génie de la viole, et qui relève plus de la tradition italienne ou allemande que de la manière française.

Pour la virtuosité et la « belle manière de toucher » n'est pas en reste. Cet élève de Gustave Leonhardt, qui fonda en 1986 le célèbre ensemble Capriccio Stravagante dont l'effectif peut varier de trois à trente musiciens, doit une partie de sa notoriété à la qualité de ses interprétations des pièces françaises pour clavecin. A la tête d'une riche discographie, il est par ailleurs l'auteur de nombreux écrits sur la musique baroque, aussi bien française qu'italienne, anglaise, espagnole ou allemande et fera paraître prochainement sur son site (www. skipsempe. com) un essai concernant la transmission de la musique au sein de la famille Couperin (dans un texte figurant dans la plaquette de cet enregistrement, il émet de sérieuses réserves quant à la paternité réelle des pièces pour orgue attribuées à ).

« Ut pictura musica » : « La musique est peinture, la peinture est musique ».

Comme de coutume chez Alpha, la présentation du disque est parfaite : pochette, illustrations, textes de la plaquette, et en particulier cette analyse captivante du tableau « Les Cinq sens », peint par Jacques Linard (1600 – 1645), écrite par Denis Grenier, du Département d'Histoire de l'Université de Laval au Québec. Sur la toile sont réunies par l'artiste « nourritures » terrestres : fleurs, fruits, compotier en porcelaine chinoise, aiguière dorée, pièces de monnaie près d'une aumônière vide, cartes à jouer – et spirituelles : recueil de musique à priori religieuse, peinture représentant un paysage, « tableau dans le tableau », miroir qui renvoie l'image d'une figue ouverte, comme une mise en abyme interrogative sur le sens de la vie et des choses. Cette « symphonie de délices » joue sur les contrastes et les trompe-l'œil, comme toute l'expression artistique de l'époque baroque et par conséquent, se fait l'écho de l'écriture musicale de Louis Couperin.

En conclusion, un disque passionnant, qui allie érudition et pur plaisir, quasiment sensuel, de la sonorité.

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