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Hommage à Luciano Berio par Yoel Levi

L'Adagio pour cordes de ouvre ce concert dédié à la mémoire des victimes du tsunami asiatique et dont la recette sera versée à une action humanitaire destinée à aider les sinistrés d'Asie. Avec le scherzo de la symphonie n°2 de Mahler débute, ensuite, l'hommage au maître italien décédé en 2003. Double hommage, car Berio a utilisé ce Scherzo In ruhig fliessender Bewegung dans sa Sinfonia. Il est bien étrange de jouer cette partition seule, car si le chef Israélien Yœl Levi maîtrise, comme à son habitude, le sens de la construction de ces grandes fresques symphoniques, les musiciens, pris à froid passent à côté de l'ironie et du ton sarcastique de cette musique.

L'orchestre laisse place aux huit chanteurs et chanteuses des Swingle Singers. Lumières éteintes, cette jeune génération d'artistes héritière du fameux groupe des années soixante, interprète A-Ronne pour chanteurs mixtes a capella, partition crée par ce même ensemble, à Liège, en 1975. Pour cette réalisation, Berio retrouve les mots de son cher poète Edouardo Sanguineti. Comme à son habitude l'homme de lettres travaille la langue : son texte est une suite d'onomatopées et de parties de phrases de langues d'origines diverses. Il emprunte à la Bible, à Dante, à T. S Elliot et au Manifeste du parti communiste. Trente ans après sa création, cette partition garde son impact et sa dynamique émotionnelle. Berio, en virtuose de la voix, joue avec la musique, créant une suite de ravissements permanents, tantôt échos d'un choral de la Renaissance, tantôt cris ou raclements de gorges issus de la vie quotidienne. Les Swingle Singers n'ont rien à prouver dans ce répertoire, ils sont superlatifs.

La seconde partie du concert est consacrée à la Sinfonia pour huit voix mixtes et orchestre  ; œuvre/collage la plus célèbre du compositeur, domaine dans lequel ce sorcier des notes excella jusqu'à la fin de ses jours. Hymne à la vie qui s'écoule, la Sinfonia, d'une structure très complexe recycle en permanence les thèmes de ses différentes parties, alors que son célèbre troisième mouvement cite le Scherzo de la symphonie Résurrection, mais aussi Ravel, Stravinnsky, Debussy et Richard Strauss. Yœl Levi à la tête d'un orchestre précis et puissant et les Swingle Singers font exploser la partition. Cette œuvre virtuose met en avant tous les pupitres du formidable et les qualités de son chef qui dirige la soirée par cœur. Espérons que le retour de l'orchestre dans la salle bruxelloise de l'ancienne maison de la radio Flagey, offre à cette phalange une visibilité et une écoute à la hauteur de son potentiel.

Crédit photographique : (c) Christian Steiner

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