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La poétique musicale de Dominique Lemaître

semble faire partie des compositeurs français contemporains un peu en marge de l'actualité musicale spécialisée. « Nul n'est prophète en son pays », ce vieil adage vaut malheureusement aussi pour les créateurs les plus prolifiques. Adulés à l'étranger et presque oubliés en France bon nombre de nos plus grands artistes ont subi l'affront d'une nation que l'on pourrait qualifier de négligente – Pierre Boulez l'aura aussi connu en son temps…

On ne peut évidemment pas comparer les itinéraires de Lemaître et de Boulez, nous aimerions simplement mettre en valeur le talent d'artistes vivants dont la réussite hors hexagone devrait nous faire un peu réfléchir sur ce qu'il est bon de retenir de nos créateurs. Argentine, Brésil, Etats-Unis, Thaïlande, Philippines, Afrique du Sud et Tunisie ont été – à part l'Europe – les pays d'accueil de la musique de . Après la Litanie du soleil (chroniqué sur ResMusica en août 2002, lire notre article), le compositeur revient en force avec un septième disque consacré à des œuvres que l'on pourrait associer à l'avènement d'une « plus grande maturité ».

Dans « Altius » pour violoncelle et seize instruments, le violoncelle omniprésent impose à l'Ensemble une voie commune quasi-parfaite. Cette pièce aux multiples effets sonores remplit l'âme et la nourrit de toutes les sensations associées à l'écoute. Le violoncelle est l'« instant » – le précieux baroque – l'Ensemble joue le rôle de médiateur entre le noyau primitif et le reste de l'univers ou des propositions futures – l'influence de Scelsi y est indéniable. Avec « Circé » pour soprano et huit violoncelles, nous entrons dans un autre Monde. C'est ici la voix qui impose le rythme et instaure un climat fait de poésie mais aussi d'étrange. Peut-être Aphrodite ? « Vers l'eau vers le feu » est un exercice de style incontournable. Comment oublier les principes de base « eau, terre, feu, ciel » que Gaston Bachelard aura exposés ? Nous sommes ici dans une impasse. Le créateur désire sauter le pas, brûler les étapes et nous proposer une musique presque inspirée du mariage d'Aphrodite et de Vulcain. « Huit à l'infini » nous ramène au présent. Mais ne nous y trompons pas, les allusions debussystes, les accents berloziens ou wagnériens, nous ramènent toujours et invariablement au questionnement de notre propre existence.

Preuve en est que les Maîtres ont formé école et que notre créateur la respire entièrement.

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