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Offenbach à la campagne

La petite salle des fêtes d’Houdain Lez Bavay, commune rurale située sur la frontière franco-belge, était comble pour accueillir la vingt-cinquième représentation en trois saisons d’« Offenbach sur canapé ».

Ce petit spectacle sans prétention n’a qu’une ambition : celle de faire passer un agréable moment musical à des publics pour lesquels ces représentations sont souvent les tout premier contact direct, « en vrai », avec l’art lyrique. Il n’y a pas d’intrigue dans ce spectacle à mi chemin entre le cabaret et l’opéra, mais des extraits judicieusement choisis des opérettes d’Offenbach et pour une pièce, de Lecocq, ils sont chantés par quatre jeunes bourgeois désœuvrés qui tentent de tromper leur ennui. Airs et ensembles s’enchaînent avec bonheur, et pas un instant le public ne s’ennuie devant ce spectacle réglé avec minutie par le bruxellois Daniel Ottevaere, professeur au Conservatoire de Valenciennes, metteur en scène et concepteur du projet, qui suit son destin avec attention puisqu’il en a assuré pratiquement toutes les reprises. Autre gage de qualité : les chanteurs, qui sont restés les mêmes depuis la création du spectacle en 2001 à l’Hippodrome de Douai. La cohésion, la complicité du groupe s’en trouvent renforcées, et c’est aussi une belle preuve de fidélité et de soutien à ses artistes, tous originaires de la région, de la part de la Clef des Chants. Quand on sait le sort scandaleux qui est souvent réservé aux chanteurs français dans leur propre pays, on se doit de le souligner.

Ces quatre jeunes chanteurs, s’ils se montrent scéniquement très à l’aise, ont cependant encore des progrès à faire musicalement. La plus convaincante est Caroline Prévot, au beau timbre fruité de soprano. La voix est longue, les aigus ensoleillés, le médium riche, la chanteuse est capable de jolies demi teintes et gratifie le public de quelques pianissimi bien maîtrisés. Ses points faibles : des vocalises un peu lourdes et une diction assez ampoulée et précautionneuse. Yves Vandenbussche fait également belle impression, ancien baryton reconverti en ténor, il peine encore dans les aigus, mais son beau timbre, ses graves solides, sa diction mordante et son émission très franche en font un chanteur qui pourrait nous donner beaucoup de satisfactions dans le futur. La voix de Mikaël Horvath est encore très verte, manquant de soutien, et le timbre assez grinçant, mais il fait preuve de beaucoup de musicalité et on sent un potentiel certain dans l’aigu. Ses « couplets du roi de Béotie » sont très réussis. Le cas de Mathilde Jacob est plus problématique, chantant souvent trop bas, elle a peu d’aigus et un vibrato envahissant, elle semble en méforme, ou bien elle affronte une tessiture qui ne lui convient pas.

Partie prenante du spectacle, la pianiste Elisabeth Bascourt assure avec beaucoup de vigueur et de tenue rythmique l’accompagnement de ses chanteurs. Cette représentation rafraîchissante clôturait en beauté la saison de la Clef des Chants, et on attend avec impatience l’annonce de la prochaine saison de l’« opéra nomade ».

Crédit photographique : © Frédéric Iovivo

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