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Requiem de Mozart : de l’inutilité…

En ces temps de crise de l’industrie du disque, dont les majors font du piratage leur bouc émissaire, oubliant un peu vite leur responsabilité en matière d’absence d’innovation et de saturation du marché, en ces périodes où l’on multiplie, à tort ou à raison, les procès aveugles contre les téléchargeurs de tout poil, on l’on pense même à interdire le concept de copie privée, les maisons de production n’ont l’espoir d’émerger du lot qu’en faisant preuve d’imagination dans leur programmation. Quel intérêt a trouvé dans ce cas la firme Naxos en sortant un nouveau Requiem de Mozart, dont les versions de référence sont innombrables? Et ceci, qui plus est, en SACD, système qui n’a pas convaincu les foules de sa supériorité technique, mais dont chacun a retenu l’inconvénient de ne pas fonctionner dans n’importe quel lecteur, ainsi que le prix majoré.

Cette réflexion irrite au point qu’on se surprend à ne trouver que défauts à une interprétation que l’on aurait peut-être encensée, si elle s’était mise au service d’une rareté, mais dans ce cas, non, rien ne passe : une soprano légère et pointue comme une Olympia des Contes d’Hoffmann, dont le timbre produit le même effet que le crissement d’un ongle sur un tableau noir, un ténor chevrotant, une basse et une alto fades. Pour compléter, un chœur propre et bien chantant mais sans personnalité, et un orchestre qui sonne bien maigrichon, sans couleurs et sans saveur. La direction de ce petit monde reproduit tous les effets pervers d’une vague baroqueuse mal comprise et mal digérée : rapide et brutale, avec des accélérations par à coups totalement incongrues, n’offrant ni intériorité, ni pathos, et dont le seul sentiment qui se dégage est l’ennui. Le fond du gouffre est atteint dans un Domine Jesus Christe version disco, tellement sautillant qu’il en devient dansant, et sur lequel on se surprend à taper du pied en rythme.

La rapidité d’interprétation, on dirait bien de survol, de l’œuvre en réduit la durée à 41’03’’, alors qu’elle dure une cinquantaine de minutes dans d’autres enregistrements, il a donc fallu compléter le CD avec Inter natos mulierum K72 (1771) et Misericordias Domini K222 (1775), qui n’ont rien de particulier pour attirer le chaland.

Cet enregistrement sera probablement acquis par deux catégories d’acheteurs : les néophytes en mal de constitution de discothèque, attirés par une nouveauté, et les ados en recherche de cadeau de Noël pour leur marraine, qui aime « la grande musique ». Ensuite, il devrait disparaître des bacs.

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