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L’Africaine de Graciane Finzi, un opéra pour adolescents

Créé en janvier 2003 à Lille, où était compositeur en résidence, l'Africaine raconte l'histoire très actuelle d'Harmonie, une jeune fille noire adoptée dès son plus jeune âge par des parents français.

Un personnage mystérieux hante ses rêves jusqu'à l'empêcher de dormir. Il s'agit de l'Harmattan, un vent venu d'Afrique, qui lui souffle de partir vers son pays natal, à la recherche de ses racines. Malgré son ami Raphaël – « On peut aimer, partir quand même » – Harmonie décide de faire route vers Marseille, où elle embarque pour l'Afrique. Une fois arrivée, elle est guidée par un ancien jazzman africain qui ressemble étrangement au vent qu'elle entendait dans ses rêves. La jeune fille parvient ainsi jusqu'à son village où elle retrouve en rêve sa mère africaine. Mais malgré le jazzman qui la presse de rester, Harmonie choisit de rentrer en Europe où l'attendent ses parents adoptifs et Raphaël. Elle quitte l'homme sur ces mots : « On peut aimer, partir quand même »…

est la compositrice de nombreuses œuvres de « classique d'aujourd'hui » – ainsi définit-elle sa musique – tant pour solistes que pour orchestre, régulièrement jouées sur la scène internationale. Avant l'Africaine, elle a notamment composé Pauvre Assassin (1992) et plusieurs autres opéras. Avec cette création lilloise, a souhaité écrire un opéra pour adolescents. Il serait pourtant difficile de faire tenir ce spectacle dans une catégorie précise avec ses parties de ballet, ses dialogues parlés et des chants parfois proches de la comédie musicale. Certains sons et bruitages sont préenregistrés – et réussis ! – et s'inscrivent dans une esthétique d'ensemble de collages, comme un grand puzzle où un ballet urbain, de belles projections, l'orchestre et les bruitages en question se combineraient pour former ce spectacle difficilement définissable.

Sandrine Tome chante le rôle d'Harmonie avec de beaux aigus. Sa voix cuivrée convient joliment au rôle. Elle ne faiblit pas lors des brusques sauts qu'elle doit exécuter du grave vers l'aigu et vice-versa. Anne Constantin incarne un beau personnage de mère, servie par la poésie des mots d'Emmanuelle Marie et l'on apprécie le joli moment où les deux mères d'Harmonie, l'africaine et l'européenne, se font face. Les rôles masculins sont en revanche moins bien tenus. La compositrice confirme l'équivoque que représente le jazzman : est-il tombé amoureux d'Harmonie ? Et peut-être ne lui est-elle pas insensible : elle lui dit les même mots d'adieu qu'à Raphaël. Et c'est au spectateur de conclure…

La partition fait la part belle aux percussions – Afrique oblige et puis Graciane Finzi aime écrire pour elles – et l'on ne peut qu'être sensible à l'émouvant leitmotiv de l'accordéon (Jean-Marc Fabiano) qui revient à chaque fois qu'Harmonie pense à Raphaël. L'écriture reste toujours simple – et sans doute à dessein, au vu du public visé – sans permettre il est vrai de mesurer l'étendue du talent de la compositrice comme dans ses œuvres symphoniques par exemple.

Crédit photographique : © Marc Ginot/Opéra National de Montpellier

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