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Bras de fer

Festival Viva España II

Le Festival Viva España de l'OPL aura connu beaucoup d'impondérables et de modifications, la moindre n'étant pas le forfait de Louis Langrée. Le chef de l'OPL était tombé juste après le Festival de janvier consacré à Mozart, se blessant au bras. Insuffisamment rétabli selon les médecins, il a dû renoncer à diriger son dernier festival en tant que directeur musical de l'orchestre, laissant la place à . Colomer n'est pas un inconnu à l'OPL, puisqu'il a dirigé l'orchestre liégeois à trois reprises depuis 1998. Faire appel à un chef espagnol pour diriger Iberia, l'Amour sorcier ou la Rapsodie de Ravel est, on s'en doute, presque l'assurance d'obtenir une interprétation idiomatique et informée de ces œuvres. Sur ce point, on n'est pas déçu, le chef imposant sa direction chaleureuse, précise et souriante à un orchestre enthousiaste.

Dans Iberia, exécutée avec beaucoup de soin, Colomer obtient des couleurs fortes et éclatantes, et des phrasés souples et sensuels. Il pêche cependant par certains relâchements de la tension et par des tempi un peu lents (on aimerait par exemple Par les rues et par les chemins plus ferme), mais l'onirisme des Parfums de la nuit est très bien rendu.

Aucun reproche à faire dans Falla en revanche, les Nuits sont douces et fraîches, et le piano noble, fier et rêveur de Nelson Gœrner, au toucher assez lourd et à la sonorité sombre, est idéalement intégré dans l'orchestre. Dans l'Amour sorcier, l'interprétation est un mélange très réussi entre une sensualité un peu languide et la vigueur rythmique endiablée de l'irrésistible Danse rituelle du feu. La Rapsodie espagnole clôt le concert avec brio, mis à part un volet initial sans mystère, les épisodes suivants, fluides et sensuels, s'enchaînent avec naturel avant une Feria totalement déchaînée, libérant une puissance orgiaque, mais toujours sous contrôle.

L'OPL réalise une très belle prestation dans ces pages qui nécessitent transparence, souplesse, couleurs et finesse. Les cordes sont d'une tenue exemplaire, les cuivres sont brillants et parfaitement en place (et particulièrement en forme dans Iberia), les percussions sont survoltées, mais ce sont surtout les bois, minces et agiles, qui réalisent des prouesses. On citera parmi ces souffleurs Sylvain Cremers au hautbois et Jean-Luc Votano à la clarinette, qui s'entendent comme larrons en foire, et sont visiblement heureux de jouer cette musique si séduisante (il faut les voir ondoyer du corps et marquer le tempo de la tête dans la Danse du feu). Un beau concert donc, propre à réjouir un public encore une fois très nombreux, auquel manquait juste le petit grain de folie qui l'aurait rendu inoubliable.

Crédit photographique : © DR

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