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Johann Jakob Walther : du très grand violon, jardiné baroque

Après un disque consacré aux œuvres de Westhoff (ZZT 050201), copieusement distingué par la critique européenne, il était naturel pour l'ensemble Les Plaisirs du Parnasse de s'arrêter sur les œuvres de Walther.

En effet, les deux violonistes et virtuoses allemands ont tous les deux des rapports avec l'Italie, et sortent de la même formation, le prestigieux orchestre du prince électeur de Saxe. (Pour la petite histoire, c'est bien Walther qui en était le premier violon, il était payé carrément quatre fois et demi plus que Westhoff). Mais un autre point commun, plus ténu, rapproche les deux musiciens : après la quasi-faillite de l'orchestre, ils publient tous les deux des recueils de pièces pour leur instrument, chacun deux exactement. Le disque des Plaisirs du Parnasse explore le second de Walther, Hortulus Chelicus (le jardin des lyres), 28 pièces publiées en 1688.

Cela dit, la comparaison est sûrement plus historiographique que musicale, parce qu'il est difficile de ne pas penser à Biber en écoutant les suites de Walther. Certes, à la différence de Biber, Walther refuse la scordatura (inverser l'ordre des cordes ou, du moins, modifier certains des notes qu'elles font à vide). Mais on retrouve les bariolages rossignolesques, les cordes multiples et les intervalles spectaculaires qui imposent la comparaison avec Biber, et qui vaut à Walther le surnom «Paganini de son siècle» de la part de Fétis. Le violoniste , pour le coup, ne se laisse pas prendre aux jeux des dramatismes dont la partition est farcie (de réputation, surtout). Nous entendons qu'il a cherché un équilibre intéressant dans un recueil connu pour être partagé entre des pièces faussement difficiles et les pages indiscutablement virtuoses. Il est presque à regretter qu'il ne partage la recherche avec l'auditeur, pour lui dispenser un travail abouti, rondement.

Repéré par Chiara Banchini à sa sortie de la Schola Cantorum de Bâle en 1997, a été soliste de l'Ensemble 415, il a joué avec Jordi Savall, René Jacobs ou, entre autres, le Parlement de Musique. Très indiqué, son jeu est profond, inspiré, parfois alangui, sachant à peine le retenir quand les pages semblent appeler le lamento. Il est aussi notoire à traiter avec une égalité stupéfiante ou désintéressée, la succession de danses disposée pour en exacerber la variété, des passacailles drôlement recueillies aux pièces imitatives à peine impertinentes. Si Hortulus Chelicus peut passer pour moins délicat que les Sonates du Rosaire (dont une excellente version est disponible chez ZZT), cet enregistrement est pour le coup indispensable, d'un point de vue documentaire d'abord, pour le plaisir de la découverte de toute façon.

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