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Petre Munteanu, l’oublié

Le nom de ne dit sans doute plus rien aux mélomanes d'aujourd'hui, mis à part, sans doute, les amateurs d'enregistrements anciens. Né en 1916, ce ténor roumain a principalement occupé les scènes internationales pendant les années 40 et 50, en interprétant notamment Ferrando à la Scala. Oublié aujourd'hui, son art nous est rendu grâce à la toujours formidable collection Historic Recordings qui a déjà publié en compact bon nombre de témoignages d'artistes lyriques de la première moitié du XXe siècle.

Certes, le style de peut paraître aujourd'hui un brin daté, comme peut l'être celui d'une Ivogün ou même d'une Schwarzkopf, par rapport aux standards actuels, qui offrent à entendre un Mozart moins ampoulé et un Rossini plus échevelé. Mais Munteanu est l'exemple même du ténor protéiforme, capable de chanter tous les rôles correspondants à sa voix, et de les bien chanter.

Il est évident qu'un peu plus tard, avec Wunderlich, on fera mieux dans Mozart, et avec Araiza ou Blake, on interprètera Rossini davantage « dans les règles », mais, c'est justement ce courage et cette multitude de facettes qui rend ce ténor méconnu aussi attachant. Tout est musical et sincère, parfait techniquement, surtout l'air de Belmonte, où il se montre bouleversant, tout simplement l'égal de Dermota et Simoneau. Tout correspond à sa voix. Aucune faute de goût n'est à dénoter dans ses interprétations. Et c'est déjà beaucoup. De plus, il est l'un des derniers témoins d'un art du chant qui disparaîtra par la suite, d'une technique que seul Alain Vanzo perpétuera, cette technique si particulière entièrement basée sur la voix de tête et qui rend les aigus si faciles, parce qu'émis en voix mixte légèrement renforcée. Cette façon de chanter, perdue aujourd'hui, lui donne une douceur et une classe incomparable. On peut certes peut lui reprocher d'être un peu cabotin et de profiter de tous les pianissimi pour faire admirer sa technique et son art des nuances, mais, avouons-le, malgré tous les effets qu'il offre à ses auditeurs et dont on sent qu'ils sont prévus et préparés, c'est terriblement bon d'entendre tant de raffinement vocal, fut-il excessif, dans une seule voix.

Et, rien que pour les fastes vocaux que ce disque ressuscite, il mérite qu'on s'y arrête et qu'on écoute avec ferveur et recueillement une façon de chanter que le temps nous a volé.

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