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Amoureuse de Massenet !

Ce CD ne nous est pas inconnu. Voici plusieurs années déjà qu'il était en vente en Australie, uniquement via Internet, et qu'il était devenu objet de culte chez tous les adorateurs de Massenet. Le voici disponible dans les bacs en France, ce qui est une excellente nouvelle.

Tout au plus regrettera-t-on la pochette australienne, rose bonbon bordée d'angelots joufflus, parfaitement en situation avec la mélodie Amoureuse, qui donne son titre au disque. La nouvelle pochette, luxueuse, représentant un papillon dans les tons de pourpre, est beaucoup moins délicieusement kitsch ! La plaquette comporte en revanche deux textes passionnants, et une présentation sérieuse de chacune des œuvres, hélas en anglais.

L'amour de pour Massenet par n'est plus à prouver, et il a concocté là un programme de raretés véritablement alléchant, mêlant habilement mélodies, oratorios et extraits d'opéra.

En matière d'œuvres religieuses, ne manque, dans la production du compositeur, que La Terre promise. Des extraits de Marie-Magdeleine, La Vierge et Eve, tout à fait cohérents dans un CD intitulé « Amoureuse » rappellent à quel point dans l'esprit de Massenet, l'amour de Eve pour Adam, de Marie-Madeleine pour le Christ, et même de Marie pour son fils, est d'essence charnelle. Comme l'a dit Camille Saint-Saëns « il eût suffi d'un rien pour ternir l'amour de Jésus et de Magdeleine ». De même, dans la mélodie complètement inconnue jusqu'à la parution du CD, Sainte Thérèse prie, dont la musique capiteuse accompagne les mots » je le possède, il m'aime, il est là, je respire son haleine… » et l'autre mélodie, Amoureuse, tout n'est que volupté…

Mis à part « il est doux, il est bon », extrait d'Hérodiade dont on peut facilement trouver une intégrale, les autres choix de portent sur des opéras plus difficiles à dénicher : Le Cid, heureusement immortalisé par Placido Domingo, Chérubin, dont une toute nouvelle version vient de paraître, des raretés : Grisélidis, autrefois enregistré au festival de Saint-Etienne, rien moins que quatre airs de Sapho dont aucune version satisfaisante n'existe en CD (il y en a trois, difficilement dénichables), et des introuvables : trois airs d'Ariane, jamais enregistré, dont la première représentation depuis une bonne centaine d'année aura lieu en novembre prochain à Saint-Etienne, et un extrait de La Grand'Tante, levé de rideau donné dix-sept fois à l'Opéra-Comique en 1867, dont le matériau orchestral fut détruit dans l'incendie de ce théâtre en 1887, et reconstitué par Brian Castles-Onion.

Pour chanter tout ceci, a fait appel à une compatriote, la soprano . Le timbre est assez beau, charnu, érotique dirions-nous, tout à fait en phase avec l'esprit massenetien et la conception du chef. Hélas, la diction est une bouillie dans laquelle il est impossible de discerner le moindre mot, et il devient très vite évident que ces rôles, dont la plupart relèvent d'une tessiture de grand lyrique, la dépassent complètement. Il est d'ailleurs impossible de distribuer à la même voix l'Infante du Cid, légère et charmante, et Chimène, véhémente et chantant dans un large ambitus, la vaporeuse Ensoleillad de Chérubin et la terrible Ariane.

Mais, pour l'amour de Massenet, que ne pardonnerait-on pas ?

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