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Quand les Jachet de Mantoue nous réinvitent au paradis…

Le très bel formé en 2000 avait à ses débuts pour vocation la redécouverte du compositeur breton Jachet de Mantoue, que les cinq chanteurs ont mis à l'honneur dans leurs premières gravures largement saluées par la presse.

Depuis, ils se sont davantage ouverts au riche patrimoine musical sacré de l'Europe de la Renaissance, avec un disque de musique anglaise, et aujourd'hui un disque consacré à l'Espagnol .

Morales est sans doute le plus grand compositeur espagnol du XVIe siècle, mais la célébrité dont-il a joui en son temps n'était pas uniquement due à la qualité de sa musique ; il a su tirer profit de l'essor de l'imprimerie musicale en Italie, faisant publier ses œuvres à Rome et facilitant ainsi la diffusion de sa musique à l'échelle internationale. Plus remarquablement encore, Morales est l'un des premiers à avoir compris les conséquences de l'imprimerie en termes de propriété intellectuelle et de droits d'auteur, prenant lui-même l'initiative de réaliser une édition monographique de ses propres œuvres.

La Missa de Beata Virgine est une messe mariale qui fut à l'époque mal reçue par le monde catholique, Morales y ayant inséré des textes prohibés par le Concile de Trente, une controverse qui allait animer les débats au sein de l'Eglise Catholique jusque dans les années 1960 ! Mais cela n'a jamais empêché cette très belle messe d'être chantée partout en Europe, souvent amputée de ses tropes problématiques.

Etant donné que cette Missa, comme toute messe, n'est pas dissociable de sa fonction liturgique, elle n'a pas été composée comme un tout ininterrompu. Les Jachet de Mantoue ont donc choisi d'intercaler divers motets entre ses différentes parties, dont Qui consolabatur me qui fait appel à une sixième voix, assurée par la soprano invitée Violaine le Chenadec.

Morales démontre à travers toutes ces œuvres inféodées à l'intemporalité sa grande maîtrise de l'écriture polyphonique, fluide et complexe, avec des modulations harmoniques riches et parfois surprenantes. L' n'en trahit rien, et illumine avec splendeur ces flots de notes édéniques. Bénéficiant à la fois d'une prise de son très limpide et de la très belle résonance naturelle offerte par la Basilique Sainte Anne d'Auray, la symbiose vocale de l' paraît plus somptueuse encore, sans que ne soit ternie la personnalité propre de chaque timbre, entre la voix charnelle et feutrée de la basse et les sonorités cristallines du contre-ténor .

Au final, un excellent disque qui vient confirmer la très grande qualité des précédents publiés par l'Ensemble, et qui ravira à n'en pas douter tout passionné de musique sacrée de la Renaissance.

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