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Comptines du Maghreb, un disque qui fera datte

« On est de son enfance comme on est d’un pays », écrivait Antoine de Saint-Exupéry. Et inversement pourrait-on dire à l’écoute d’A l’ombre de l’Olivier, le Maghreb en 30 comptines qui fut, lors de sa parution en 2001, le premier disque de chansons d’enfants du Maghreb.

Depuis, il est resté sans réelle concurrence. Mêlant des chants d’hommes, de femmes, des voix d’enfants dans des arrangements contemporains, A l’ombre de l’Olivier séduira autant les enfants que leurs parents des deux côtés de la Méditerranée.

Alors que les disques de comptines françaises sont légion depuis des décennies, aucune maison de disques n’avait réuni et publié le répertoire d’Afrique du Nord, et c’est un éditeur de livres qui a finalement comblé ce manque. La comparaison est riche d’enseignement. Il est frappant de constater que les chansons parmi les plus populaires et les plus belles évoquent des conditions de vie difficiles voire tragiques. En Tunisie, Maymoūna raconte l’histoire d’une mère qui vole de la levure pour que ses enfants puissent manger du pain levé et des beignets le jour de l’Aïd. En Algérie, Yā dounyā traite de la douleur de l’enfant qui a perdu ses parents. Le thème de la pluie est récurrent. Ainsi au Maroc Aoūlād alharrāta chante la pluie de manière mélancolique et exerce un charme envoûtant. On trouve également de superbes berceuses d’Algérie, Oūlāh yā oūlāh dont l’atmosphère arabo-andalouse nous rappelle la fascination du Moyen-Age occidental pour l’Orient, et Atas atas amimmī berceuse kabyle pour petite fille (exclusivement !) qui semble trouver ses sources profondes du côté du Portugal.

A l’ombre de l’Olivier paru initialement en format de grand livre-disque, est aujourd’hui réédité à prix moyen sous la forme plus simple de disques en jaquette digipack. A l’heure où les labels discographiques enrichissent leurs disques de livrets développés, Didier Jeunesse accomplit le chemin inverse en devenant lui-même éditeur de disque. Le livret de 16 pages propose une version réduite du livre, sans sacrifier au soin porté aux langues, à savoir la présentation des textes en arabe et français, et à la transcription de l’arabe dans les caractères arabes et latin. L’illustration évite soigneusement toute évocation exotique, tout au plus peut-on se croire en Provence. Une timidité qui est sans doute un parti-pris d’universalité, pour échapper au piège d’un folklore facile. De la première livraison de trois livres-disques sous forme de disque seul, laquelle comprend A pas de velours et Comptines et chansons du Papagaio, A l’ombre de l’Olivier est sans équivoque la réédition musicalement la plus réussie et culturellement la plus stimulante.

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