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La Dame aux Camélias

La Dame aux Camélias est un de ces sujets d'œuvres « vivantes » qui a touché tous les secteurs de l'art, roman, théâtre, opéra, mais la danse aura dû attendre Neumeier pour que soit donné vie – dansée – à ce mythe de la période romantique. Et quoi de plus logique que de s'inspirer des œuvres de Chopin pour illustrer le propos ? L'œuvre de Neumeier est déjà immense par ses dimensions, si rares de nos jours : un véritable ballet en trois actes, avec dans chacun d'entre eux, un grand pas de deux, mais également des démonstrations de virtuosité du corps de ballet, des différents protagonistes, tels que Prudence Duvernoy, Gaston Rieux ou Olympia, qui ont chacun des variations. Ensuite, c'est une œuvre qui frappe d'intelligence et d'évidence : aucun pas ne semble de trop, et même si certains portés se révèlent acrobatiques, ils illustrent aussi la tourmente fébrile de ceux qui les exécutent. La difficulté était aussi de rendre l'intrigue lisible sans la rendre trop lourde et imposante, et sans le recours de la pantomime (et là où commence aussi le véritable travail d'acteur). Le traitement psychologique des personnages est admirablement bien élaboré par Neumeier, même si les premières confrontations avec le ballet ne permettent pas forcément d'en apprécier toutes les subtilités. Un ballet qui se livre peu à peu dans l'intimité du couple, laissant de côté le faste des fêtes et parties de campagne auxquelles s'adonnent les demi mondaines et ceux qui les entretiennent.

, dont le rôle a été fait sur mesure pour elle, convainc dans le portrait qu'elle brosse de la courtisane et, malgré les outrages du temps qui discréditent son physique, elle parvient à faire croire à une histoire dont l'issue ne pourra être que fatale. Elle évolue au fil du ballet, et même dans la structure des actes, où la superbe et la beauté laissent place à la fragile vulnérabilité. Elle est accompagnée par un jeune , qui possède une certaine immaturité assumée, et qui est bien dansant. Le corps de ballet est très en place, et les seconds rôles sont très efficaces, notamment, la Manon de Lynne Charles ; elle évoque le double de la pensée de Marguerite, à la fois de la manière la plus sordide qui soit (la vicieuse prostituée avide d'argent), et également de la façon la plus amoureuse et la plus mélancolique, confrontée au temps qui passe, la mort constituant la seule rédemption possible.

Le ballet est dans ce DVD enregistré comme une pièce cinématographique et les changements de plan, d'actes, sont judicieux, sans effets inutiles. On goûte alors le dénuement des décors, qui contraste singulièrement avec les costumes éblouissants, moirés ou satinés. Quant à la direction musicale, elle est efficace, et l'on est sensible au bon accompagnement pianistique de Volker Banfield.

On recommandera donc chaudement la vision de cet enregistrement, ne serait-ce que pour un peu mieux saisir les volontés originelles du chorégraphe.

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