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29 comptines de Chine et d’Asie

Directrice de l'association Musique en herbe, Chantal Grosléziat recueille avec passion les comptines du monde entier. Fruit de deux ans de collecte en France, ces pièces témoignent de la transmission dans nos cités occidentales, des chansons enfantines d'Asie (Chine, Vietnam, Cambodge, Laos, Corée, Japon, Thaïlande). Un livre cartonné, de la taille d'un disque noir, propose les textes sur un fond de peintures sur deux pages, aux couleurs douces où passent, selon la comptine, une barque, le museau d'un lapin, l'éléphant blanc, des paysannes dans les rizières. Les poèmes figurent dans la langue d'origine mais aussi traduits et transcrits phonétiquement dans notre alphabet, ce qui permet de mieux suivre les sonorités de chaque langue, voir d'apprendre les chansons tout en écoutant le disque, comme les enfants japonais apprennent les nôtres. On plonge au cœur de la culture asiatique, dans ses profondeurs ancestrales, ses rites agraires, ses jeux et ses danses ; l'enfant s'adresse aux étoiles, au tigre, le loup s'invite chez les lapins quand Maman est sortie. Au cours de l'écoute, nous nous découvrons une mémoire commune qui remonte au fonds des temps et à notre inconscient.

Les pièces sont chantées tantôt comme des mélopées, telle l'admirable et célébrissime berceuse japonaise Nen, nen, korori yo où les notes du koto prolongent la mélodie que la voix de Mieko Miyazaki rend envoûtante, tantôt par des voix d'enfants en chœur ou en solo. L'alliance subtile des instruments, la flûte, le shakuhachi, utilisé par les moines boudhistes, aux sonorités d'une pureté incomparable, mariée au luth à trois cordes ou au monocorde, au khène cambodgien nous transporte dans un rêve ravélien. L'enfant occidental, et ses parents, retrouveront avec bonheur la magie de mélodies non mesurées et de rythmes variés autrement subtils que ceux dont ils sont abreuvés quotidiennement sur les ondes. Et quand soudain, des voix d'enfants chantent des poèmes chinois et coréens sur l'air de Frère Jacques ou de Ah, vous diraije Maman avec accompagnement de musique asiatique, leurs contrefactures nous livrent de magnifiques exemples d'un métissage plus fin que bien de nos « arrangements » et que n'aurait pas refusé Mozart.

On aimerait plus de comptines par pays, pour mieux percevoir les identités nationales. Cela viendra, espérons-le. Le grand livre des chansons du monde reste à faire, alors que les récits sont bien mieux connus. Les recueils de cette collection, tous récompensés par l', ouvrent la voie.

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