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Orphée aux enfers

Mezzo

Orphée aux enfers, opéra féerie selon la définition d’Offenbach s’inspire, probablement, des traditions carnavalesques de la ville de son compositeur, Kohl où chaque année des parodies d’arguments mythologiques étaient mise en scène. Orphée et son épouse Eurydice (qu’on dirait au bord de la crise de nerfs) loin d’être le prototype des amants fidèles, sont en réalité un couple qui s’ennuie : elle, une lolita moderne et lui, un pauvre musicien. A coté de ce deux mortels stressés par l’ordinaire, les dieux anciens : des lâches livrés à l’oisiveté et aux vices.

Tout est satire et parodie, de l’opéra de référence, l’Orphée de Gluck (dont l’air « Che farò senza Euridice » est plusieurs fois cité) jusqu’à la représentation de la scandaleuse joie de vivre de la société parisienne du Second Empire (célébrée avec le galop infernal). A se moquer des us et coutumes de son temps avec le personnage symbolique de l’Opinion publique, deus ex machina sauveur des apparences.

Ironie, gaieté, sarcasme sont les atouts de cette production ; un travail de théâtre musical parfaitement réussi associant la maitrise du chant à celle de la déclamation. L’exaspération d’Eurydice (une amusante Natalie Dessay) va de pair avec la résignation d’Orphée (Yann Beuron) ; leurs cris désarticulés sont une façon de se moquer des aigus entonnés du bel canto, les gestes mécaniques et agités des danseurs une façon de ridiculiser la beauté classique de l’expression corporelle.

Cette relecture impertinente, amusante et paradoxale de l’opéra, du mythe grec, de l’amour laisse entrevoir parfois une certaine nostalgie d’un passé sous le signe de la grâce et de la pureté.

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