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Felicity Lott poétesse enchanteresse

Ce disque est le reflet d'un profond travail musical et a pour résultat un concert intime d'une beauté poétique poignante. Il s'agit de très belles transcriptions, tout particulièrement réussies par Christian Favre, de grandes partitions symphoniques avec voix. Cela permet d'une part à la voix lyrique de de s'emparer de ces pages dévolues aux voix bien plus amples et d'autre part aux superbes musiciens du de rendre une lisibilité à des pièces souvent interprétées avec lourdeur.

Les Rûckert-Lieder bénéficient d'un orchestre Mahlerien modeste mais aux sonorités très variées et recherchées. La variété est pourtant ici parfaitement respectée et l'oreille ne subit aucune perte au contraire certains détails deviennent bien plus lisibles. Et ce qui frappe, c'est l'audace au niveau des nuances que nous proposent et ses complices. Sa voix se fait caméléon pour se mêler aux timbres chauds des cordes surtout de l'alto. Mais le piano se taille une belle part car les riches harmoniques de Mahler lui sont dévolues. Ces mélodies très aimées dans les concerts avec orchestre et dans les Abendlieder se situent ici dans un entre deux très original. La finesse des mots est parfaitement présente, mais l'ampleur quasi symphonique du quatuor est également superbe sans jamais couvrir la voix. Les Wesendonck-Lieder associés directement à la mort d'Isolde nous permettent d'entendre dans un compositeur qui met en valeur nombre de ses qualités. La précision de la diction permet une évocation poétique admirable. La subtilité des phrasés et des nuances est ensorcelante. Cette version se range à coté des plus prestigieuses. Jamais peut être leur valeur d'esquisse de Tristan n'aura été si limpide. Le prélude et la mort d'Isolde sont en effet encore plus proches de ce qui est la prémonition de ce chef-d'œuvre. Le travail de timbre et de dynamique admirable du est incroyable dans le prélude. Il est rare qu'une transcription ne semble rien perdre d'une partition aussi complexe et ajoute même à la compréhension de l'œuvre. La mort d'Isolde nous permet de déguster le chant crépusculaire de Félicity Lott très à l'aise dans une tessiture dégagée des flots orchestraux habituels qui parfois obligent nombre de soprano à grossir un chant qui en somme devrait toujours être ce chant de mort en apesanteur.

Et que la langue allemande est belle ainsi ! Quel dommage de ne pouvoir bénéficier des textes et de leur traduction, c'est là le seul défaut de ce CD car la prise de son et la présentation sont superbes. Un disque pour musiciens avides de beautés poétiques. Un CD de rêve.

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