- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Mozart maltraité

La Compagnie du Savoir

On croyait en avoir fini avec les inepties dont la France fut abreuvée pendant l’année Mozart, battant en cela tous les records du monde. Pas du tout : cette fois, un disque pour enfants paraît, navrant à tout points de vue. Mise en bouche : la couverture : « génial compositeur, mais homme tourmenté, confronté à des déceptions sentimentales … sa vie est un véritable roman … » Mozart a cependant laissé « d’incroyables chef d’œuvres » (sic : c’est ainsi qu’on apprend l’orthographe aux enfants à la Compagnie du Savoir). Le contenu est à l’avenant : « accueilli à Vienne, en 1762, par la cour Impériale » dont on énumère complaisamment les membres et leurs titres, Mozart, y joue, selon l’auteur, non du clavecin, mais du piano. Notons qu’il a alors six ans et demi et non « à peine cinq ans » comme il est dit. Les exemples musicaux ne correspondent en rien au texte ; aucun respect de la chronologie ; ainsi, pour la visite à cette Cour Impériale, on entend non une des premières œuvres du compositeur, un menuet, un trio, par exemple, mais les Variations K. 24 de … 1766. Quant à la sérénade Eine kleine Nachtmusik (Une petite musique de nuit), K. 525, composée à Vienne en 1787, elle illustre le texte sur L’enfant prodige. Pour la mort de la mère du compositeur, on entend un extrait de Don Giovanni. De toute façon, l’auditeur n’a droit qu’à quelques mesures des 29 œuvres retenues et souvent en bruit de fond. Le Miserere d’Allegri, que le jeune Mozart copia de mémoire après l’avoir entendu une fois, est précédé de l’entrée en grégorien qui n’a rien à voir avec le propos, comme si le choix de l’illustration musicale s’était fait sans écoute préalable. Les numéros de Köchel sont omis la plupart du temps. Les bruits : portes qui claquent, sabots de chevaux, fouet de cocher, tiennent une place parfaitement inutile. Du texte, on retient surtout les interventions du père de Mozart, Léopold, tantôt autoritaire, tantôt platement béat devant son fils, l’image fausse d un piètre personnage qui promène ses enfants « en tournées » à travers l’Europe, comme de singes savants, et se dispute avec son épouse. Puis la haine de Mozart contre Colloredo, l’évêque de Salzbourg, l’amertume du compositeur. Le tout enrobé de niaiseries diverses : Mozart « profite du bon air de la campagne » lors de ses voyages et « file le parfait amour » avec Constance. Rien sur la formation du compositeur, sur ses premiers opéras, son enjouement, sa tendresse, son sens de l’amitié, de la clémence divine et humaine, autant de choses pouvant intéresser et toucher un enfant tout en guidant vers l’écoute de la musique de Mozart.

« Savoir » plus qu’approximatif. Mozart maltraité, la musique aussi. Vraiment déconseillé.

Il est annoncé que La Compagnie du Savoir, c’est aussi « Louis XIV…. sur des musiques de Mozart ». Sauvons-nous !

(Visited 412 times, 1 visits today)