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Festival Brahms à Liège, Saison II épisode n°1

Aimez-vous Brahms ? La question avait déjà fait l'objet d'un festival la saison dernière à l'OPL et le public avait bien évidemment répondu par l'affirmative… Le succès de ce festival porté par les retrouvailles entre les musiciens liégeois et le chef d'orchestre justifiait la programmation d'une nouvelle plongée dans l'univers du compositeur allemand. Nostalgie d'une période romantique et célébration d'un classicisme jalonnent l'œuvre de Brahms qui, loin de devenir esclave des méthodes d'écriture qu'il affectionne parvient à les magnifier, souvent à les dépasser, jetant alors les prémisses de nouveaux styles d'expressions qui feront les succès de Mahler ou encore Dvorak.

La symphonie n°3 qui ouvre ce festival, est de haut vol. Langrée emporte l'orchestre avec lui dès les premières mesures vers une lecture franche et résolue. Il captive l'attention de l'ensemble de ses musiciens qui nous révèlent la somme de détails et subtilités de l'orchestration. Les cordes expriment avec ardeur les tensions de ce premier mouvement tandis que la petite harmonie s'illustre par une rythmique précise ne sacrifiant jamais la beauté des sonorités.

Le second mouvement traduit d'avantage la sérénité, incarnée ici par les dialogues tout en rondeur des bois auxquels répondent la voix profonde des violoncelles. Le Pocco Allegretto qui suit est certainement « LE » tube de . Langrée nous le livre dépoussiéré de l'habituel pathos, respectant les préceptes qu'il aura développé dès le début de cette symphonie. Le tempo est allant, les bois distillent avec bienveillance leurs savoureux contrechamps avant que les cordes ne laissent s'évanouir cette douce atmosphère de rêverie mélancolique. Le chef conclut avec maestria cette symphonie dont nous retiendrons l'intelligence et la finesse de l'interprétation, jusque dans les derniers coups de timbales, parfaitement « déposés » avant que le public ne retienne son enthousiasme durant de longues secondes afin de mieux laisser résonner le silence, nous donnant un dernier frisson.

Le concerto pour piano n°1 proposé en deuxième partie de ce concert s'articule assez bien après l'écoute de la symphonie tant il reste imprégné par la forme symphonique que le compositeur avait d'abord cherché à élaborer. Brahms avait en effet, sur les conseils de Robert Schuman dès 1854 esquissé les premières pages d'une symphonie. Travaillée au clavier, Brahms a rapidement dû admettre que sa partition était faite pour laisser chanter le piano. L'orchestre y tient presque un rôle de deuxième soliste, dialoguant souvent d'égal à égal avec le piano. Choisir comme interprète de ce concerto était judicieux à plus d'un titre, l'artiste portant une double casquette d'instrumentiste virtuose et de chef d'orchestre. Il vient ainsi d'être tout récemment nommé chef de l'Orchestre de Chambre de Vienne. Nous avons pu percevoir dans sa prestation la vision globale qu'il pouvait avoir de l'œuvre, dépassant ainsi le cadre strict de son clavier. Son jeu s'avère d'une incroyable densité, sa technique se joue de la rythmique particulièrement complexe qui anime l'œuvre. Aux éclats violents développés dans le premier mouvement, Vladar sait également opposer des respirations bouleversantes de pudeur. , très attentif à son soliste, insuffle à l'orchestre précisions dans les phrasés ainsi qu'une énergie débordante menant orchestre et soliste à un final enthousiasmant.

Applaudi chaleureusement, s'installera à nouveau au piano pour offrir au public une émouvante Consolation n°3 de Franz Liszt. Cette première journée de festival laisse augurer de manière tangible d'autres grands moments d'émotion.

Crédits photographiques : © DR

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