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ONF-Masur-David Fray : Intégrale Beethoven sous le signe de Mozart

Ce second concert de l'intégrale Beethoven entreprise par pour marquer la fin de ses six années de direction du National, nous a permis d'entendre trois œuvres marquées du « n°2 ». Numéro qui peut être parfois trompeur, car, d'un point de vu chronologique, le Concerto pour piano n°2 précède de peu le n°1, ces deux concertos précédant eux-mêmes la Symphonie n°1. Et d'un point de vue strictement musical, on peut affirmer qu'il y a plus d'originalité, de nouveauté dans les deux « n°1 », plus typiquement beethovéniens, que dans les « n°2 » plus volontiers mozartiens, spécialement le concerto.

Mais avant ces œuvres « de jeunesse », venait un chef-d'œuvre de maturité avec l'ouverture Leonore II, très proche en légèrement moins développée, de la grandiose Leonore III. Cette fois-ci on retrouve le plus génial Beethoven, avec ses fameux passages « injouables » que seuls les plus grands orchestres lors de leurs meilleurs soirs réussissent à réaliser pleinement, au point de soulever le spectateur de son siège lors de ses moments d'emballement à la puissante tellurique dont Beethoven avait le secret. Point tout à fait de cela ce soir, point d'emballement dévastateur, sans doute afin d'éviter justement la dévastation qui guette si la virtuosité d'ensemble n'est pas à la hauteur. D'un côté c'est dommage, mais d'un autre mieux vaut sagement garder le contrôle que de se laisser déborder par des dérapages, fussent-ils furieux. Par ailleurs la couleur un peu claire de l'orchestre, où l'assise grave des cordes fait toujours un peu défaut, et les cuivres sans coloration particulière, contribuaient à laisser une impression moyenne, où la précision contrôlée l'emportait sur la puissance expressive.

Pour le Concerto pour piano n°2 a fait appel au jeune pianiste français . La vision qui nous a été proposée ce soir, en parfaite cohérence entre piano et orchestre, tirait clairement vers Mozart plus que vers le Beethoven typique. Ce qui, dans ce concerto, est loin d'être une incohérence. Ainsi on a pu apprécier des phrasés élégants et chantants, un équilibre dynamique harmonieux, un climat expressif clairement préromantique et lyrique plus que puissant et énergique. Et dans cet esprit là, l'exécution de ce soir était plutôt réussie et fort agréable à entendre.

S'il n'existe pas vraiment de symphonie de Beethoven facile à exécuter (la cinquième étant peut être la plus difficile à rater), la Symphonie n° 2 du fait de son caractère quelque peu atypique n'est pas la plus facile, non d'un point de vue strictement technique, mais plutôt d'un point de vue expressif. Wilhelm Furtwängler, sans doute le plus grand chef beethovénien de l'Histoire ne s'y est jamais senti très à l'aise, et la joua fort peu. nous en a donné une version brillante tout autant que scrupuleuse, à mi-chemin entre le Mozart de la Jupiter et le Beethoven de l'Eroïca, favorisant la stabilité des tempi, sans excès d'aucune sorte, mais aussi, comme lors de la Leonore II, sans déclencher en nous un enthousiasme spontané. Là encore, la couleur parfois acide des cordes, dont les premiers pupitres, à l'engagement une fois encore exemplaire, se détachaient de pupitres du rang un peu sur la réserve, nous empêchait de jouir de la puissance d'impact espérée. Mais la conduite globale du discours fut convaincante et la précision de l'orchestre excellente.

Crédit photographie : © DR

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