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Deux pianistes, quatre mains, six chefs-d’œuvre

Nuits musicales de Mazaugues

Depuis 1984 le village de Mazaugues, ancienne « réserve de glace » de la Provence coincé dans une vallée escarpée du massif de la Sainte-Baume, accueille pendant l'été un festival qui n'a rien d'humble : François-René Duchâble est un habitué des lieux, Jean-Philippe Collard, Augustin Dumay, Paul Meyer ou Olivier Charlier ont été des invités réguliers, et pour 2008 le théâtre de verdure du Château verra passer pas moins que le quatuor Talich et Nemanja Radulovic. Pour l'ouverture, les Nuits musicales de Mazaugues ont choisi le fait de deux sœurs, une résidente près de Marseille – Anait – l'autre résidant à Erevan – Arminé. Les sœurs Sogomonyan forment ce duo depuis huit ans, la consécration ayant eu naturellement lieu en 2006 lors de l'« année de l'Arménie en France ».

La Sonate en si bémol majeur de Mozart débute le concert tout en douceur, dans une tension progressive, au moment ou les bruits du jour et du soir – crissement des cigales, piaillement des martinets – disparaissent peu à peu. Mais les sœurs pianistes commencent à donner le meilleur d'elles-mêmes dans ces très festifs trois extraits des Danses Hongroises de Brahms, suivies d'une interprétation magistrale de la version quatre mains des Préludes de Liszt. Cette œuvre, dépouillée de son apparat orchestral sous lequel elle est mieux connue nous apparait ainsi comme dans sa « vérité première », surtout sous de tels doigts experts.

La magie continue d'opérer dans la célébrissime Fantaisie en fa mineur de Schubert. Optant pour une pulsation plutôt lente, les sœurs du font littéralement chanter leur unique piano, transformant cette œuvre en un poème symphonique pour clavier. Après quelques anecdotiques – et forts réussies – Danses slaves de Dvořák, fin en apothéose sur une œuvre qui n'a rien de grandiloquente : la suite Dolly de Gabriel Fauré, jouée on ne peut plus délicatement, qui nous replonge en enfance. En bis, pour honorer la fraîcheur ambiante – les nuits provençales ne sont pas nécessairement chaudes – un extrait des Danses norvégiennes d'Edvard Grieg, toute en finesse, pour prendre congé d'un public respectueux et conquis.

Crédit photographique : DR

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