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Le New-York Philharmonic & Maazel, luxueux mais sans l’étincelle

Poursuivant sa tournée européenne après un passage au Festival de Lucerne les 2 et 3 septembre, le Orchestra sous la baguette de son chef créait l'événement de rentrée de la Salle Pleyel les 8 et 9 Septembre avec, à l'affiche, un programme des plus éblouissants comme le Concerto en fa pour piano de Gerschwin avec Jean-Yves Thibaudet en soliste et le Sacre du printemps donné lors de la première soirée parisienne.

Le deuxième concert était exclusivement symphonique et débutait avec la suite orchestrale de Ma Mère L'Oye de , une œuvre dont la retenue et le dépouillement volontaire de l'écriture ne sont pas vraiment le propos de cette phalange rutilante. De fait, ne parvient pas à instaurer cette poésie de l'écoute dans La Pavane de la Belle au bois dormant dont la phrase mélodique toute simple manque de naturel. Le maniérisme de la baguette de Maazel ne sert pas davantage l'errance mélodique du Petit Poucet ni le charme de cette musique de plein air qui ne respire pas librement sous sa conduite très pointilleuse. Il est plus à l'aise avec la féerie sonore de Laideronnette impératrice des Pagodes sollicitant la technicité de haut vol d'un orchestre remarquable par sa transparence et l'éclat de ses couleurs. Si les Entretiens de la belle et de la bête – superbe contrebasson – manquent de dramaturgie sonore, l'éblouissement final du Jardin féerique subjugue en revanche nos oreilles avec ses éclats d'or et d'argent qui jaillissent avec panache du pupitre des percussions.

L'orchestre ne déçoit pas dans le Mandarin merveilleux de Bela Bartòk dont il exalte la hardiesse des textures sonores, la crudité des timbres – celui de la clarinette gouailleuse – et la noirceur du tableau. En revanche il nous a manqué une certaine profondeur de champ et un souffle narratif pour donner du sens au discours et relier les séquences sonores, en bref une cinétique du son qui électrise cette «musique infernale». Mais le maestro dirigeant par cœur ce répertoire qu'il possède jusqu'au bout de sa baguette ne rate pas sa sortie en impulsant un crescendo final d'une puissance phénoménale.

Avec la Symphonie n°4 de Tchaïkovski – écrite en même temps que son opéra Eugène Onéguine donné le même soir à Garnier – qui couronnait la soirée, c'est la somptuosité sonore des cuivres qui se déploie dans un premier mouvement mû par une bonne synergie. Plus engagé dans sa direction, Maazel aborde cependant l'Andante avec une certaine distance sans trouver la couleur affective de cette superbe ligne mélancolique ; sa reprise ornée de fioritures instrumentales est en revanche un instant de grâce absolue. Comme une mécanique de précision, les cordes en pizzicatti dans le scherzo donne la mesure de leurs possibilités virtuoses avant l'arrivée très théâtrale des vents dans les deux «trios» dont Maazel souligne violemment les contrastes sonores.

Malgré un final plus convenu, on serait volontiers resté sur cette dernière note russe sans l'inévitable et désormais triviale cinquième Danse hongroise de Brahms suivie de la rituelle – et non moins galvaudée – Suite de l'Arlésienne, qui pointent là les signes d'une routine pour le moins décevante !

Crédit photographique : © Silvia Lelli

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