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Reinbert de Leeuw, le temps et la lumière

2008

Dominique Marco et l'équipe du de Strasbourg célébraient à leur tour le centenaire de la naissance de Messiaen en programmant ce Dimanche 21 Septembre La Transfiguration de notre Seigneur Jésus-Christ, une œuvre très rarement donnée (trois fois seulement en cette année anniversaire contre 60 Turangalîla !) que Messiaen jugeait la plus réussie. Le texte en latin extrait de la Bible et de la Somme théologique de Saint Thomas d'Aquin est une longue méditation sur l'illumination, «cette lumière intelligible qui est celle du divin». Le chiffre 7 hautement symbolique préside à toute son élaboration : Sept solistes instrumentaux – les deux chanteurs n'ont qu'un rôle minime – et deux parties (les septénaires) de 7 pièces chacune de durée très inégale. Pas moins d'une heure quarante de musique pour cette somme théologique confiée principalement au chœur soutenu, encadré voire épaissi par un orchestre dont la richesse des textures colorées évoque à maintes reprises le Saint François d'Assise auquel Messiaen allait bientôt s'atteler. Tout le texte est dévolu au chœur qui, privé de l'évangéliste, assure lui-même les récits imprégnés de l'esprit du plain-chant grégorien. Les quelque cent vingt choristes merveilleusement préparés vont alterner une psalmodie très pure – cernée par une percussion lumineuse et doublée par l'orchestre – et le chant plus orné des méditations que l'on aurait souhaité plus souple parfois. Il est fréquemment relayé par les commentaires de l'orchestre et les ponctuations toujours spectaculaires de la percussion (gongs, tam, cymbales, cloches-tubes et luminophone) embrasant l'espace de résonance. Aux instruments solistes sont confiées les «cadences-oiseaux» toujours très véloces – fulgurant Gérard Bouwhuis au piano – et certaines plages plus intimistes (celle de la fin du premier septénaire) confiant notamment au violoncelle – merveilleux – une partie vibrante et expressive très exposée. A la tête de cette immense formation (216 participants au total !) réunie sur le plateau de la grande salle du Palais de la musique et des congrès dont l'acoustique, pour la circonstance, s'est avérée plutôt favorable, déploie une énergie extraordinaire pour préserver l'équilibre des masses en présence et ménager de formidables gradations ascendantes jusqu'au triple fortissimo de la dernière méditation.

Les deux Septénaires sont conclus par un choral (on pense bien évidemment à Bach) dont chaque note de la mélodie très lentement déroulée par le chœur au complet est enrichie d'un agrégat d'harmonie colorée du plus bel effet sonore ; le tout convergeant vers la résonance finale de l'»aveuglant» accord de mi majeur : transportant !

Crédit photographique : © DR

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