- ResMusica - https://www.resmusica.com -

Un vent de fraîcheur pour les Grands motets de Lully

Grande Journée Lully du CMBV

L'année Lully du Centre de Musique Baroque de Versailles est presque terminée et pour cet avant-dernier concert, la jeunesse et l'enthousiasme nous ont permis de redécouvrir, et le mot est faible, des œuvres qui depuis déjà fort longtemps subissaient une adaptation au goût du temps, nous ayant fait perdre la beauté rayonnante et la jeunesse éternelle de ces pages.

Si Lully n'inventa pas le Grand Motet, il lui donna toute la somptuosité que Louis XIV en attendait pour célébrer les cérémonies religieuses extraordinaires de la cour. Et Louis XIV avait plus qu'une oreille, il aimait la musique passionnément et c'est peut-être aussi pour cela qu'il sut donner à Lully les moyens de surpasser ses prédécesseurs, l'autorisant même à faire de son Te Deum, une œuvre personnelle (puisque composée non pour une occasion royale mais pour le baptême de son fils, dont le Roi fut le parrain).

Ce soir, Louis Castelain et le Parnasse français, nous ont donné à réentendre ses œuvres en apportant un soin particulier à la place des chœurs et au rôle trop longtemps oublié du Petit Chœur. Non seulement ce dernier a bénéficié pour cela des voix solistes idéales pour les récits mais également pour nous permettre de redécouvrir le soutien qu'il peut apporter à la sublimation des voix du Grand Chœur.

Trois œuvres ont été interprétées par le Parnasse français, outre le glorieux Te Deum, le surprenant et presque pastoral, Plaude Laetare Gallia ainsi que le doloriste et lumineux O lachrymae.

Le chef a pu puiser l'énergie de sa direction en s'appuyant sur un orchestre à la française à 5 parties de violons (et oui, les 24 violons du Roi font école). On a pu entendre dans les parties de basse un serpent, au son profond, particulièrement sombre, venant rehausser de ses ombres la texture soyeuse de l'orchestre. La direction de Louis Castelain allie précision, soutien, nuances et rondeur. Les solistes du Petit Chœur d'une belle homogénéité, apportent des couleurs chatoyantes aux mots, et la diction de leur latin rend perceptible la force de ces derniers. Ils sont tous bouleversants dans les parties de récits qui leur appartiennent et tous mériteraient d'être cités pour leur qualité vocale et leur présence qui habite ces textes dits en latin françisé. Nous retiendrons, mais bien injustement pour les autres et Catherine Padaut dont l'expressivité et l'engagement dans le O lacrymae touchent au sublime. Tous apportent donc au Grand Chœur cette force marmoréenne et flamboyante si nécessaire à ces œuvres. Toutes ces voix semblent s'élever vers la voûte, enlaçant les ors et les ombres de la Chapelle Royale. En solo, en duo ou trio ou tous ensembles, ils donnent corps et lumière à la musique de Lully. Le Te Deum splendide nous emporte alors vers cet instant tant attendu où les trompettes et les timbales résonnent et où les chœurs balaient toute peur, toute angoisse pour donner à la lumière sa gloire universelle et atemporelle. Un bis seulement, mais quel bis nous laisse repartir brisés mais heureux par la révélation de tant de beautés.

* Voix solistes

Crédit photographie : © Monique Parmentier

(Visited 392 times, 1 visits today)